Page:Revue des Deux Mondes - 1849 - tome 4.djvu/897

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des classes souffrantes, donner la sécurité et l’impulsion au commerce, l’agriculture et à l’industrie, soutenir les droits et la dignité de la France dans les affaires du monde ; mais tous ces partis sont convaincus qu’ils ne peuvent faire cela qu’à une condition. J’appelle cette condition leur but commun, immédiat, pratique. Quelle est-elle ? C’est d’enchaîner, l’esprit révolutionnaire, d’anéantir le socialisme, d’exterminer le parti du mal.

Ce but n’est point atteint : tout le monde le sait et le sent. Tout le monde le voit se dresser sur nous dans sa formidable nécessité. Il y a plus : quiconque a sur ses épaules une tête saine et dans sa poitrine le cœur d’un Français sait aussi, par une expérience de soixante ans, que le parti révolutionnaire est impuissant quand les partis monarchiques sont unis ; mais que dès qu’il se fait entre nous une division, un brèche, une fissure, le parti de la folie, de la destruction et du crime passe à travers, et qu’alors la France sombre dans le sang, la misère et la honte.

Ces choses-là sont d’une vérité si saisissante, qu’elles ne sont plus même discutables au sein des partis monarchiques. Le but de leur union dure et persistera long-temps. Par le président et la majorité de l’assemblée législative, le parti modéré est maître du gouvernement. Il faut qu’il se serve du gouvernement pour vaincre les socialistes et les révolutionnaires. Pour cela, le parti du bien maître du gouvernement a dans les circonstances actuelles, une triple tâche à remplir. Premièrement, le pouvoir repose aujourd’hui sur une base révolutionnaire ; la constitution-Marrast le condamne à changer de mains tous les quatre ans ; cette instabilité perfide affaiblit tous les ressorts de force publique, toutes les garanties de la sécurité sociale, et laisse ouverte aux destructeurs la chance d’un de ces succès de surprise et de confusion, les seuls sur lesquels ils puissent compter. Il faut donc rendre au pouvoir une base stable et permanente. Secondement, il y a dans nos institutions organiques, dans notre administration, notre enseignement, notre centralisation ; notre régime municipal, notre régime économique, nos lois de pesse, des disparates, des incohérences, des contradictions, des vices, qui alimentent l’esprit révolutionnaire ; il faut donc refaire nos lois organiques de manière à couvrir la société contre ses ennemis d’une ceinture de retranchemens et de forteresses. Troisièmement, le socialisme nous poursuit d’attaques quotidiennes : affaires courantes, événemens de chaque jour, mouvemens d’opinion publique, sont pour lui des occasions incessantes de combat ; il faut donc tourner sans cesse contre lui la surveillance, l’influence, l’action, la force du pouvoir exécutif ; il faut gouverner dans le sens propre du mot. Ainsi, un travail de reconstitution du pouvoir, un travail de législation organique, un travail de gouvernement et de police, voilà les