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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 juin 1850.

Le parti modéré n’a pas de bonheur. Il vient de remporter une grande victoire sur les ennemis de la société ; il a, par la loi du 31 mai 1850, purifié le suffrage universel. Nos adversaires étaient en retraite de tous côtés, non-seulement ils étaient vaincus, mais ils le sentaient. Ils avaient été vaincus par la force légale, et c’est là surtout ce qui discréditait leur cause, puisqu’il n’y avait pas eu besoin du recours aux armes pour vaincre le parti de l’insurrection, le parti qui menace sans cesse de faire une révolution. Le scrutin avait suffi pour les mettre en déroute. Après un pareil succès qui commençait une nouvelle ère, le parti modéré pouvait espérer que rien ne viendrait, pendant quelque temps du moins, troubler la marche de la politique. Une question que nous ne pouvons pas cependant appeler imprévue est venue déranger cet accord des esprits, et semble faire revivre dans le parti modéré des distinctions d’origine et de but que nous regardons toujours comme dangereuses. Nous parlons du crédit supplémentaire relatif aux frais de représentation du président, et nous constatons, quoique avec chagrin, l’effet que la présentation de ce projet a produit dans la majorité.

Nous croyons que cet effet, que nous déplorons, aurait pu être prévenu, si le parti modéré avait été mieux averti et de plus longue main par le gouvernement, ou s’il avait, à défaut d’avertissement, prévu lui-même l’indispensable présentation d’un pareil projet. Les gens prudens doivent toujours s’attendre à ce qui est probable et nécessaire, et quand ils ont, comme ils l’ont eu pendant quelques momens dans la majorité de l’assemblée, le sentiment de la surprise, nous disons que c’est leur faute.

Qui a pu croire en effet de bonne foi que le président de la république, avec le train qu’une sorte de commune opinion exigeait de lui, avec la vie qu’on souhaitait lui voir mener, avec l’habitude prise dans le pays de s’adresser au chef de l’état en je ne sais combien d’occasions, et d’en faire une sorte de providence visible, qui a pu croire que le président de la république pourrait