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La vallée du Caïstre, celles de l’Hermus et du Caïcus sont tout aussi fertiles que la vallée du Méandre ; mais, moins cultivées que cette dernière, elles sont de plus envahies en partie par de vastes marécages qui ne naissent et ne se développent que faute de quelques précautions prises pour empêcher l’accumulation des détritus charriés par les rivières. La vallée du Caïcus, qui s’étend le long du littoral et va se rattacher à la belle plaine d’Adramite, est surtout d’une admirable fertilité. Non-seulement elle est très favorable à la culture du riz, qui, à en juger par le peu qu’on en récolte, donne un produit peu inférieur aux qualités les plus recherchées de Damiette : elle fournit encore la plus forte portion des grains et de l’huile d’olive exportés en Europe par les échelles d’Aïvalhy et de Tchanderly. C’est particulièrement dans le bourg de Somma que se fait le dépôt central de ces deux produits, et surtout des grains récoltés dans les plaines de Pergame, de Kirkagalch, etc. Le kilo de blé se paie à Somma de 17 à 20 piastres[1], et se vend, transporté à Aïvalhy, à raison de 19 à 22 piastres ; les marchands européens de Trieste, Marseille, Gênes, etc., qui font acheter les grains à Somma même, les revendent ensuite en Europe à 24 et à 26 piastres le kilo. La quantité de grains fournie annuellement par Somma à Aïvalhy, et destinée à l’exportation pour l’Europe, est environ de 500,000 kilos turcs (7,500,000 kilogrammes). La portion de la vallée du Caïcus qui avoisine la mer, depuis Aïvalhy jusqu’à Adramite, fournit aussi un riche contingent d’huile d’olive, dont une grande partie est exportée en Europe. Le montant annuel de cette exportation, effectuée par Aïvalhy et Adramite, peut être évalué de 100 à 150,000 kantars[2] ; or, comme le fisc prélève annuellement sur les olives récoltées dans ces localités une dîme de 25,000 kantars, la production brute annuelle doit y être de 250,000 kantars ou de 75 millions de kilogrammes. C’est sur le pied de 180 à 200 piastres le kantar (33 kilogrammes) que l’huile d’olive est achetée par les Européens dans les échelles d’Aïvalhy et d’Adramite.

On connaît maintenant la configuration de l’Asie Mineure, on connaît aussi les principales sources de sa production agricole : la région des plateaux, et les grandes vallées de la région montagneuse. À quoi se réduit aujourd’hui le travail de l’homme dans ces deux régions, et que pourrait-il être ? C’est sur la région des montagnes et sur la culture des céréales que notre attention se portera d’abord.

Dans les vallées de cette région, comme dans une grande partie de l’Asie Mineure, le sol n’est jamais fumé, et le labour se réduit à l’action superficielle d’une charrue vraiment primitive, construite exclusivement

  1. ) Un franc correspond à peu près à 4 piastres turques, car la piastre turque est composée de 40 paras ; or 170 paras sont acceptés dans le commerce à raison d’un franc.
  2. De 32,000,000 à 63,000,000 de kilogrammes.