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sexes pour ne plus tenir compte que de l’âge, on trouve que la part des enfans au-dessous de douze ans est de 25 et souvent de 33 pour 100 ; telle des individus des deux sexes âgés de plus de dix-huit ans n’excède jamais 40 pour 100. Il en résulte que les ouvriers mâles arrivés à la virilité ne concourent à la fabrication de la soie que dans la proportion de 15 à 20 pour 100. Il est donc évident que la moyenne des salaires doit se régler sur les gages des femmes et des enfans.


III

Avant de discuter les preuves de décadence que le socialisme prétend trouver dans la situation de l’industrie anglaise, il convient de faire remarquer pour les districts industriels de l’Angleterre, comme pour Londres, qu’il n’est point légitime de tirer une conclusion générale d’observations restreintes. Lorsqu’on fait porter son argumentation sur des catégories spéciales d’ouvriers, on donne le droit de mettre en dehors de la question la très grande majorité des corps d’états et par conséquent de la population laborieuse. Cette objection, si forte déjà, n’est point d’ailleurs la seule qui se présente à l’esprit. Si les ouvriers anglais ne peuvent même pas subsister avec les salaires actuels, d’où proviennent les sommes considérables reçues par les caisses d’épargne des villes et des districts manufacturiers, caisses d’épargne qui ont été créées sur la demande des ouvriers, et dont quelques-unes sont presque exclusivement alimentées par eux ? Comment existent les institutions appelées Mechanic Institutes et tant d’autres établissemens fondés et entretenus exclusivement par les contributions des ouvriers ? .D’où viennent les fonds dont disposent les diverses unions d’ouvriers, et qui leur ont permis de subvenir aux besoins de soixante mille et même de quatre-vingt mille personnes pendant des grèves de plusieurs mois ? Comment prospèrent les compagnies formées pour faciliter aux ouvriers l’acquisition du droit électoral ? On sait que dans les comtés la franchise est attachée à la possession ou à l’occupation de ce qu’on appelle un free-hold de 40 shillings de revenu annuel, ce qui fait que les comtés sont le rempart de l’aristocratie territoriale. Les promoteurs de l’association réformiste qui a succédé à la ligue, c’est-à-dire les hommes de Manchester et les députés radicaux, ont compris que, pour enlever à la grande propriété les élections des comtés, il ne suffisait pas de faire enregistrer tous les hommes ayant droit de voter, mais qu’il fallait créer des électeurs nouveaux. Des compagnies se sont donc formées dans beaucoup de comtés pour acquérir les grandes propriétés mises en vente, et les subdiviser en lots de terre de l’importance nécessaire pour conférer la franchise, et qu’on cède au prix coûtant à des ouvriers qui s’acquittent par des cotisations mensuelles. C’est par