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VOYAGE ARCHÉOLOGIQUE EN PERSE.


çais, au contraire, ont organisé l’armée du châh, fortifié ses villes, enseigné aux Persans l’art de fabriquer des canons. Si le roi de Perse et son peuple avec lui sont aujourd’hui sous la dépendance des consuls anglais ou russes, c’est que ni le châh ni ses sujets n’ont su profiter des leçons qu’allèrent leur donner avec un généreux dévouement les officiers distingués que Napoléon avait chargés de préparer l’affranchissement du continent asiatique.

Quoi qu’il en soit, et pour en revenir aux antiquités de Persépolis, il est constant que les piliers placés au haut du grand escalier formaient les jambages de deux magnifiques portes séparées par un groupe de colonnes entre lesquelles circulaient les visiteurs avant d’être introduits dans le palais. D’après les fragmens retrouvés, ces colonnes étaient semblables entre elles ; elles étaient cannelées et reposaient sur une base également ornée de cannelures ; elles étaient surmontées d’un chapiteau très élevé composé de plusieurs pièces et d’une forme très bizarre. La première partie de ce chapiteau rappelle, dans son ensemble, la tête du palmier ; elle se décompose en deux portions : l’une retombe sur le fût et figure les branches desséchées de cet arbre, qui naturellement s’abaissent et se courbent ainsi sur le tronc ; l’autre représente les branches nouvelles pleines de sève, qui s’élancent au-dessus des autres, et auxquelles leur poids seul fait décrire une très légère courbe. Cette partie est surmontée d’un assemblage de seize volutes disposées sur quatre faces qui se coupent à angles droits, et sur chacune desquelles sont quatre volutes, dont deux en haut et deux en bas, s’enroulant sur elles-mêmes. Sur ce faisceau de cannelures et de volutes reposait un corps de taureau auquel s’adaptaient deux têtes et deux poitrails tournés en sens inverse ; les jambes étaient repliées sous le ventre. Emblèmes de la force, les effigies de ces animaux avaient été placées là comme supports de l’entablement que devaient soutenir ces colonnes. On voit en effet, entre les deux cols, sur la portion du dos qui leur est commune, une partie plate et refouillée où était encastrée la plate-bande en pierre ou en bois qui régnait d’une colonne à l’autre. Quant aux têtes, elles étaient entièrement dégagées.

Le voyageur aujourd’hui, comme autrefois le courtisan ou le solliciteur, après avoir franchi ce portique, doit tourner au sud pour arriver aux palais qui se trouvent groupés à droite du plateau. En face de lui se dressent, au milieu des débris d’un grand nombre d’autres, treize colonnes restées debout. Entre la terrasse sur laquelle s’élèvent ces colonnes et le portique qu’on vient de quitter est un vaste espace dans lequel on ne voit d’autres restes que ceux d’un bassin carré creusé dans le roc. Il est impossible que cet espace compris entre le portique et le grand palais qui lui fait face ait été autrefois complètement vide.