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ces adhésions hésitantes. Désormais, les tendances de la révolution ne lui semblaient plus douteuses : c’était le principe aristocratique même qu’on niait, en attendant sans doute l’occasion de le détruire. Le noyau flottant de la grandesse s’isola donc plus que jamais du régime nouveau.

Quant à la classe moyenne, privée de toute direction un peu homogène par la défaite ou l’abstention des influences qu’elle s’était accoutumée à suivre, tiraillée en trois sens divers par le clergé, par le pouvoir et par les clubs, qui, ici comme partout, n’avaient pas tardé à se mettre en lutte ouverte avec le pouvoir, elle avait pris pour elle l’adage favori du marinier portugais : « Il en sera ce que Dieu voudra et Notre-Dame. » Sa docilité même devenait un danger de plus dans un régime où l’exiguïté du cens, le suffrage direct et la liberté absolue d’association assuraient la plus grande part d’action aux influences d’en bas. Tous les élémens de désordre étaient surexcités, tous les élémens de cohésion neutralisés. Et comme si ce n’était pas assez de dissolvans, les divers ministères septembristes poursuivaient, par nécessité de position, à travers le chaos des partis, la fondation d’un tiers-parti, faisant, selon l’usage, du gouvernement dans la rue et du septembrisme dans le gouvernement, patronant en haut la révolution qui les faisait vivre, la fusillant en bas pour ne pas périr, administrant ainsi de la même main au pays qui n’en pouvait mais le poison et le contrepoison, au risque de tuer le patient dans ces alternatives répétées de guérison et de maladie.

Voilà les résultats de cette constitution de septembre, qui est encore aujourd’hui le principal mot d’ordre de l’opposition portugaise. La charte de dom Pedro, outre qu’elle se recommandait de la popularité d’un grand nom, avait ici le rare mérite de parer avec une précision rigoureuse à tous les grands dangers du moment. Par l’interdiction des clubs, elle enlevait tout à la fois à l’agitation miguéliste un prétexte et un moyen d’agitation. Par le système d’élections à deux degrés, combiné avec le maintien d’un cens très faible, elle suppléait à l’inexpérience des masses électorales, tout en utilisant leurs bons instincts. Par l’appât d’une pairie héréditaire, consécration formelle du principe aristocratique, elle ramenait vers le milieu constitutionnel les influences nobiliaires qui s’en éloignaient de plus en plus. Le fait seul enfin de la restauration de la charte, en symbolisant la défaite de cette fraction du libéralisme qui s’était montrée, en Portugal comme en Espagne, la plus âpre et la plus agressive dans les démêlés de l’état avec Rome, était une sorte d’avance aux susceptibilités religieuses, et préparait les voies à un rapprochement. Voilà ce que comprit M. da Costa Cabral, et j’ai insisté à dessein sur ces détails peu connus. Le coup de main de 1842, où l’on n’a cru apercevoir de loin qu’un de ces