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la Certitude et le Dictionnaire des sciences philosophiques, et nous devons l’indiquer au public, non pas peut-être comme un modèle de déduction élégante, largement éclairée de cette belle clarté qui vient de l’ordre simple et sévère des idées, mais comme un traité régulier, solidement construit, d’un style simple et ferme, et qui forme sans aucun doute, avec son vaste cortège de notions sur les mathématiques, l’astronomie, la physique, la chimie et l’histoire naturelle, l’exposition la plus savante qui ait encore été présentée de la nouvelle philosophie spiritualiste.

Quelle est donc cette philosophie tant attaquée par les adversaires les plus divers ? Les uns l’accusent d’être panthéiste et lui attribuent de la sorte un caractère très déterminé ; les autres lui reprochent de n’avoir pas de caractère, d’emprunter quelque chose à tous les systèmes sans rien produire de précis et d’original. Toutes ces attaques se résument dans un dilemme qui paraît triomphant à nos divers adversaires : de deux choses l’une, ou votre philosophie, qui prétend réconcilier les systèmes du passé, aboutit, elle aussi, à un système, et alors elle succombe sous la loi générale que vous imposez à tout système, savoir : d’être exclusif, et par conséquent faux ; ou bien votre philosophie n’aboutit pas à un système, et alors elle n’est qu’un amalgame arbitraire d’idées disparates, elle ne conclut pas, elle n’est pas.

Ce spécieux dilemme a certainement un avantage, qui est de procurer à ses auteurs cette satisfaction particulière que donnent à certains esprits les syllogismes réguliers et les raisonnemens bien déduits ; mais, avec tout le respect du monde pour la logique en général et pour le dilemme en particulier, nous prendrons la liberté de croire que les ingénieux adversaires de la nouvelle école n’ont pas suffisamment considéré deux sortes de choses qui ont bien leur prix tout comme la logique, je veux dire la nature de l’esprit humain d’une part, et de l’autre les lois de l’histoire de la philosophie.

Si nos contradicteurs veulent bien faire quelque état de ces grands objets, ils reconnaîtront une première vérité, dure pour l’orgueil humain, mais parfaitement certaine, c’est qu’un système, à la façon dont ils l’entendent, est tout simplement une chose impossible. Ce principe, si nous parvenons à les y convertir, les mènera comme par la main à un autre qui n’est pas non plus fort agréable aux esprits ambitieux et d’une seule pièce, mais qui ne laisse pas que d’être également très certain, c’est que l’ère des systèmes est aujourd’hui épuisée. Voilà des affirmations qui peuvent choquer au premier abord, et même être prises pour des paradoxes : quelques réflexions très simples suffiront cependant pour en faire éclater l’évidence et la solidité.

Qu’entendent nos adversaires par avoir un système ? Suffit-il de s’être formé une opinion précise sur les principaux problèmes de la philosophie ?