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louanges de l’histoire, c’est pour n’avoir pas souvent fait une part plus large à la publicité, que lui conseillait la politique. Dans ses bonnes œuvres comme en toutes choses d’ailleurs, Louis-Philippe réprouvait le charlatanisme et l’apparat ; le secret lui paraissait le plus indispensable auxiliaire de la charité royale.

On sait que les souffrances du commerce avaient fixé, dès les premiers jours de son avènement, toute l’attention du roi. 30 millions avaient été consacrés par une loi spéciale à faire des avances au commerce en général, surtout aux industries dont la stagnation momentanée mettait en péril l’existence des grandes populations ouvrières. Cependant plusieurs établissemens industriels n’avaient pas seulement un pressant besoin d’avances : quelques-uns, et des plus considérables, ne pouvaient se maintenir qu’à l’aide de subventions permanentes. Le principe de ces subventions n’avait pas été admis par la loi, qui n’autorisait que des avances remboursables à échéances fixes. Le roi n’hésita pas à venir au secours de l’état, et à compléter les bienfaits de la loi par des sacrifices personnels qui s’élevèrent à plusieurs millions.

D’autres malheurs restaient encore à soulager. Justement avare des deniers publics, la loi ne dispensait, ainsi que nous venons de le dire, ses générosités qu’au commerce et à l’industrie : l’ébranlement de certaines fortunes particulières n’y trouvait aucun appui. La bonté de Louis-Philippe ne resta pas sourde à de douloureuses confidences. Dans cette première crise, le roi consacra plus de 1,200,000 francs à réparer des ruines honorables, à soutenir certaines existences menacées. Parmi ses obligés de cette époque, nous pouvons, sans inconvénient aujourd’hui, citer en première ligne Benjamin Constant. Dès long-temps détourné de ses intérêts personnels par les travaux de la pensée, et plus tard par les luttes de la tribune, Benjamin Constant voyait arriver à la fois les infirmités de la vieillesse et les angoisses d’une pauvreté qu’il n’avait pas prévue. La liberté de ce brillant esprit pouvait y périr. Le secret de ces embarras fut mal gardé pour le roi, qui envoya immédiatement au grand publiciste un bon de 200,000 fr. sur sa cassette.

Deux autres noms bien connus figurent encore parmi ceux des capitalistes ou des négocians qui durent à Louis-Philippe de ne pas subir les rigoureuses conséquences d’un naufrage commercial ce sont ceux de MM. Audry de Puyraveau et Jacques Laffitte. M. Audry de Puyraveau, associé d’un honorable négociant, M. Gallot, avait vu sa maison de commerce ébranlée par la secousse révolutionnaire. Des indemnités reçues de la ville de Paris pour réparation des dommages éprouvés pendant les journées de juillet, une part dans la distribution du fonds de 30 millions accordés par la loi spéciale, n’avaient pas suffi à raffermir son crédit. Une main secourable pouvait seule l’arrêter sur le penchant