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afin d’être à même de garantir l’inviolabilité du territoire helvétique. Le député de Genève, M. James Fazy, arguait de la marche rapide des événemens, qui commandait d’avoir promptement recours à des mesures efficaces. Il ne fut réellement soutenu que par la députation de Vaud. Les troupes françaises, disaient ces députés, étaient bien près de la frontière ; le territoire sarde pouvait être envahi en quinze heures, et l’armée qui viendrait la première dans ces provinces serait considérée comme ayant le droit de les occuper. En revanche, la grande majorité des députations, celle de Zurich en tête, firent observer que le théâtre de la guerre entre le Piémont et l’Autriche était trop éloigné pour que la Suisse courût, de ce côté-là, quelques dangers. Fribourg faisait même pressentir que, si la Suisse occupait le Chablais et le Faucigny, les puissances voisines pourraient justement se plaindre d’une occupation qui paraîtrait moins décrétée pour garantir la sécurité de ces provinces que pour faire des conquêtes. D’ailleurs, ajoutait-on, le moment était mal choisi pour créer des embarras au roi de Sardaigne, qui avait noblement pris les armes pour défendre l’indépendance de l’Italie. Sur la proposition de Berne, seize états adoptèrent un ordre du jour qui, sans rien préjuger pour l’avenir, éloignait momentanément la proposition de Genève. « Considérant qu’il n’y a pas lieu pour le moment d’occuper les provinces dont il s’agit, considérant qu’en l’absence de la diète, le Vorort (directoire) a pour devoir de veiller à la sûreté de la Suisse, la diète décrète qu’elle passe à l’ordre du jour. »

La question d’occupation des frontières sardes n’était pas la seule toutefois qu’eût soulevée la guerre du Piémont contre l’Autriche. Dès les premiers jours d’avril, le chevalier Racchia, major-général du génie piémontais, s’était présenté au directoire comme agent diplomatique extraordinaire de la couronne de Sardaigne, et lui avait remis une note dont nous ne saurions mieux préciser l’intention et le caractère que par quelques extraits[1] :


Berne, le 6 avril 1848.

« La position géographique de la Suisse au centre de la grande ceinture des Alpes qui bordent la péninsule italique, sa tendance naturelle vers la mer, et l’analogie actuelle des principes politiques des gouvernemens respectifs, tout lui conseille aujourd’hui plus que jamais de cimenter avec l’Italie les rapports les plus intimes comme les plus profitables.

« Mais cette Italie, depuis si long-temps opprimée par ces étrangers que vos ancêtres surent avec tant d’énergie repousser loin d’eux, luttant en ce moment

  1. Le texte même de cette note n’a jamais été publié.