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LITTERATURE DRAMATIQUE.




LES CONTES DE LA REINE DE NAVARRE, comédie de MM. Scribe et Legouvé




Pour bien connaître Marguerite de Navarre, il faut l’étudier dans sa correspondance. C’est là, en effet, qu’elle se montre à nous tout entière, sans arrière-pensée, sans déguisement, car ses lettres n’étaient pas destinées à la publicité. Les Poésies et les Contes de Marguerite, utiles à consulter sans doute, sont loin de nous éclairer d’une lumière aussi sûre. Cependant pour tout esprit bien fait, qui prend la peine de comparer les Contes et les Poésies, il y a dans le caractère spécial de ces deux recueils un digne sujet de méditation, et de cette comparaison jaillit une pensée bien voisine de la vérité. Je ne veux pas dire des Contes de la reine de Navarre ce que Montesquieu disait de la loi salique. Il est pourtant vrai que la plupart de ceux qui en parlent ne les ont pas lus. Il s’en faut de beaucoup que tous ces contes soient égrillards. À côté d’un récit qui semble emprunté à Boccace, on trouve le récit d’un amour malheureux, exalté jusqu’à l’héroïsme, jusqu’à l’abnégation la plus sublime aux yeux des ames tendres, la plus folle aux yeux des esprits qu’on appelle sensés. Il y a dans les Contes mêmes de Marguerite un côté mystique, moins frappant sans doute que dans ses Poésies, mais qui pourtant n’échappe pas aux regards d’un lecteur attentif. Chaque récit, sérieux ou grivois, est suivi d’une discussion en règle sur le mérite et les vertus des personnages mis en scène, et dans cette discussion le sentiment chrétien se produit presque toujours