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DE L'ESPRIT PUBLIC


ET


DE LA PRESSE EN FRANCE




I

Où en est l’esprit public en France ? où en sont la raison et la conscience du pays ? Puisque c’est lui qui gouverne par la parole et par l’élection, il est bien naturel de s’adresser cette question avec une certaine inquiétude. Nous avons beaucoup discuté sur les devoirs et les attributions du pouvoir, sur la manière d’organiser les institutions qu’avons-nous été nous-mêmes ? que sommes-nous ? Depuis environ trente-cinq ans, la France est une société libre ; nous avons réclamé et obtenu le droit, je dirais volontiers la tache de diriger nos propres affaires : comment les avons-nous dirigées ? Les lois restrictives, qui défendaient aux capacités latentes de montrer ce qu’elles pouvaient ou ne pouvaient pas, sont tombées ; en permettant aux mérites secrets de se manifester, le gouvernement représentatif nous a mis à même de nous connaître : que nous a-t-il appris ? Quelles capacités, quelles incapacités se sont révélées au grand jour ? Comment enfin se solde le compte de ce que l’esprit public doit aux énergies salutaires et aux folies nuisibles que la liberté a autorisées à s’exercer à leur guise ?

Par l’esprit public, notons-le bien, j’entends ce qui est partout et nulle part en particulier ; j’entends non point les idées que le pays