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châtier dans une partie du Tell, le Hodna, et, dans le pays montagneux de l’Aurès. Le colonel Canrobert, chargé de cette mission, éprouva à Narah une résistance qui lui valut un nouveau titre de gloire, et qui l’obligea à brûler la ville insolente, après en avoir fait passer les habitans par les armes.

Quelques mois après, le choléra achevait l’œuvre de la guerre ; mais ce fléau n’épargna pas plus les vainqueurs que les vaincus : il porta la désolation au sein des tribus, en décima une partie en même temps qu’il détruisit presque totalement notre garnison de Biskara.

Il faudra beaucoup de temps pour que tous ces désastres soient oubliés et réparés. Toutefois la pacification des Ziban est complète aujourd’hui. Leurs habitans, terrifiés par de si cruels exemples, se soumettent à la volonté de Dieu et au joug de la force. Ils peuvent d’ailleurs comparer, avec les maux qu’ils s’attirent par la guerre, les biens qu’ils trouvent dans la soumission. Notre domination assure aux Arabes des oasis une sécurité pour leurs personnes, une liberté pour leurs transactions, une prospérité pour leur industrie, qu’ils ne connaissaient pas dans le passé. Il faut les habituer à en comprendre, à en ressentir l’heureuse influence ; car, de toutes les parties de l’Afrique où règnent nos armes, peut-être celle-ci est-elle la plus intéressante, celle qui peut le mieux répondre dans l’avenir aux sacrifices et aux espérances de la France. Et quand on se figure ce que peuvent rapporter ces forêts de palmiers où se cueillent les plus belles dattes, ces peuplades laborieuses, à la fois industrielles et agricoles, dont les produits sont dignes des marchés d’Europe, on comprend tout ce qu’il est permis d’attendre de nos relations futures avec un pays dont la civilisation commence, et qui est sans fin comme le désert.


Charles Bocher.