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la lacune et qui couvre le déficit. Toute diminution des taxes opérée sur une large échelle se traduit par un abaissement, sinon correspondant tout au moins considérable dans le chiffre du revenu public. De là, quand un excédant du revenu se manifeste, la nécessité de ne pas le sacrifier d’une manière absolue à la modération de l’impôt, et d’en consacrer une partie à la réduction de la dette publique, pendant que l’on tient le reste en réserve pour parer aux exigences de l’imprévu.

C’est pour avoir manqué à cette règle élémentaire de l’administration des finances que le gouvernement britannique a fait naître, à diverses reprises, pour le royaume-uni, des embarras qui ont bien pu concourir à développer le génie de la nation en le mettant aux prises avec les obstacles, mais qui ont laissé dans sa dette des traces ineffaçables et qui l’ont exposée aux plus grands périls. Sir Robert Peel n’est pas le premier ministre qui ait imaginé, en Angleterre, d’améliorer, par des remaniemens de taxes, l’assiette du revenu public. Dès 1830, le duc de Wellington avait fait remise de l’impôt sur la bière, qui produisait au-delà de 100 millions de francs. L’année suivante, le revenu se trouva diminué d’environ 90 millions, somme à peu près équivalente. E 1831 à 1836, lord Grey et lord Melbourne retranchèrent successivement ou réduisirent diverses taxes jusqu’à concurrence de 178 millions de francs. À mesure qu’un excédant se déclarant dans le revenu, sous l’influence de la prospérité qui allait croissant, au lieu de l’appliquer au remboursement de la dette, ils s’empressaient d’affaiblir les ressources en dégrevant l’impôt. Aussi, lorsque l’activité industrielle et commerciale parut se ralentir, et avant même les jours de l’adversité, le déficit se révéla, d’abord accidentel, mais bientôt prériodique. En vain le parlement accorda-t-il un droit additionnel de 5 pour 100 sur toutes les taxes ; le déficit ne fit que grandir jusqu’au changement du ministère et du système. Plus tard, en 1846, la retraite de sir Robert Peel ayant laissé le champ libre aux whigs, ceux-ci reprirent leurs allures ; en moins de trois années, ils se virent réduits à couvrir un nouveau déficit par un emprunt de 2 millions sterling que l’excédant de 1850 a servi à rembourser.

Que fera-t-on de l’excédant de 1851 ? La prudence commande évidemment de le consacrer au rachat de la dette, et de ne plus toucher de quelque temps à un système financier dans lequel l’équilibre tient à un accident et qui ne laisse entre les dépenses et le revenu qu’une marge aussi étroite ; mais l’opinion publique ne permet pas au gouvernement de prendre conseil de sa prévoyance et de l’intérêt réel du pays.

Le chancelier de l’échiquier, entraîné par la violence de ce courant, avait proposé de convertir la taxe des fenêtres en impôt sur les maisons, avec perte de 700 ; 000 liv. sterl. (17,500,000 fr.) pour le trésor.