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c’est le roi, comme dit M. Berryer, le premier des Français par le droit de sa race, et, à ce titres il ne peut rien de plus qu’attendre. Sincèrement et pensant comme nous pensons, nous ne craignons pas de l’avouer, c’est un grand rôle, et nous sommes plus d’une fois au moment de le souhaiter à nos amis. Restent donc ceux qui n’attendent pas, ou, pour parler plus vrai, ceux au nom desquels on déclare, sans les consulter, que l’on n’attendra pas. Etes-vous pour la candidature du prince de Joinville, exilé par les lois de la république ? Etes-vous pour la « candidature du prince Louis-Bonaparte, président actuel de la république française ? Tel est le dilemme dans lequel d’excitations en excitations la presse est arrivée à s’enfermer elle-même en y voulant enfermer la France avec elle. La réponse est pourtant bien simple et bien péremptoire ; à l’heure qu’il est nous ne savon qu’une chose : — D’une part la candidature du président actuel d.la république est encore inconstitutionnelle, et nous désirons précisément que la constitution soit changée pour que le pays, s’il lui convient de le choisir, ne soit pas gêné dans son choix ; d’autre part, la candidature, probablement légale, du prince de Joinville n’est pas encore une candidature avouée, bien au contraire, il est même très incertain qu’elle doive l’être, et nous désirons précisément que la constitution soit changée pour que la France puisse, s’il lui plait, épargner à l’oncle du comte de Paris l’embarras de cet aveu. Toute notre politique est là : changeons d’abord la constitution, puis tout viendra par surcroît. On remarquera peut-être, et rien de plus facile, que c’est bel et bon ; mais que la constitution ne sera pas changée, qu’il faut s’y résigner et se comporter en conséquence. À quoi nous n’avons plus qu’une réponse, c’est qu’il faudra voir ceux qui, muets ou non, voteront jusqu’au bout contre le pays ; c’est que la constitution ne sera jamais plus près d’être changée que lorsqu’on aura, parce ces expériences répétées, reconnu et déterminé les motifs de ceux qui s’opposent à ce qu’on la change ; c’est que le changement qui se fera de la sorte se fera nécessairement aux dépens de ceux qui l’auront refusé.

Nous tenons beaucoup, pour notre part, à constater nettement la situation respective des promoteurs les plus ardens de ces deux candidatures, écloses avant le jour où elles pouvaient éclore. M. le président de la république et M. le prince de Joinville n’ont l’un et l’autre exprimé sous leur responsabilité personnelle qu’une seule et même déclaration, à savoir qu’ils étaient l’un et l’autre aux ordres de la France, si la France avait envie de recourir à eux. Laissez-là donc publier en toute liberté ce qu’elle veut et ce qu’elle ne veut pas !

Le président s’est suffisamment expliqué sur lui-même dans plus d’une occasion importante, Il a dit son mot ; on peut être convaincu qu’il pratiquera, selon l’esprit du moment et selon le penchant du pays, ou la politique de l’abnégation ou la politique de la persévérance. Le mot du prince Louis Bonaparte, ce n’est pas autre chose, en somme, que la formule de la conduite du prince de Joinville. Ce qui résulte de plus précis des conversations de Claremont telles qu’on les a divulguées, c’est que jusqu’à plus ample informé le prince ne désavouera pas ceux de ses amis qui ont pris les devans pour appeler sur son nom les suffrages de la France, mais il se défend encore et davantage et bien raisonnablement de vouloir les avouer. Il ne les avouera pas, voici le côté de l’abnégation il ne les désavouera pas, voilà le côté de la persévérance ! On a réciproquement beaucoup blâmé des deux parts la sagesse avisée qui s’accommodait