Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 11.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de débouché qu’à l’intérieur, il n’a point été surprenant que, pour 100 hectares cultivés, il y en eût 37 qui ne le fussent pas ; les terres les plus rapprochées de la mer étaient alors les moins bien placées ; ce sont aujourd’hui celles dont la culture est le plus encouragée par l’état du marché.

La plus grande partie de ces terres incultes est à l’état de mielles. On n’entend par ce mot ni des alluvions sujettes à être recouvertes par les eaux qui les ont formées, ni des dunes montueuses comme celles qui bordent la mer d’Ostende à Dunkerque et de Boulogne à la Somme. Les mielles sont des dépôts de gros sables marins trop pesans pour obéir, comme ceux qui s’amoncèlent en dunes, aux caprices de brises modérées ; elles sont de deux à trois mètres au-dessus du niveau des hautes mers ; la surface en est légèrement ondulée et presque partout fixée sous un gazonnement grossier ; elles ressemblent, en un mot, à celles de Cherbourg, qui, vouées jusqu’en 1811 à une stérilité qu’on croyait irrémédiable, sont actuellement rangées parmi les terres les plus productives du pays[1].

C’est presque partout une ruineuse entreprise que la mise en culture de pareils terrains : le moyen d’en tirer parti est ordinairement de les couvrir de bois et d’attendre, pour demander au sol des récoltes annuelles, que la lente accumulation des débris des feuilles et des herbes l’ait doté d’un mélange suffisant d’humus. Ici la tangue met les défrichemens à l’abri de la stérilité fatale à laquelle aboutit toute culture dépourvue d’engrais : les mielles, les landes auxquelles elle est appliquée donnent d’abord en abondance des racines, des récoltes vertes, des céréales, et la rotation de cultures dans laquelle la terre alimentée d’engrais acquiert une fertilité croissante s’établit de soi-même.

Le mouvement moyen de la navigation des trois années 1847, 1848 et 1849, a été sur cette partie de la côte :


tonnes
à Diélette, de 11,388
à Port-Bail et Carteret, de 3, 475
Saint Germain-sur-Ay, de 1,102
à Regnéville, de 15,589
à Granville, de 90,827
total 122, 384

C’est bien peu pour un si riche pays, mais l’avenir vaudra sans doute mieux que le présent ; le champ ouvert aux améliorations agricoles le promet, et chaque navire qui demande un chargement à la côte y provoque un défrichement.

  1. Voyez la livraison de la Revue des Deux Mondes du 15 avril 1850.