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dramatisée par les conteurs, l’histoire de la vieille église s’était en quelque sorte perdue, comme l’histoire des héros du moyen-âge, dans tout un cycle légendaire ; elle s’en allait page à page comme le monument lui-même pierre à pierre ; mais, par une coïncidence heureuse, ce que d’habiles architectes ont fait pour l’édifice, un habile érudit vient de le faire pour les souvenirs historiques. Notre-Dame est aujourd’hui doublement restaurée.

Une importante publication relative à l’église métropolitaine de Paris a récemment trouvé place dans la Collection des documens inédits sur l’histoire de France ; elle contient, sous le titre général de Cartulaire de Notre-Dame, tous les actes concernant cette église, émanés des papes, des rois, des comtes, des évêques, des abbés et des officiaux, les privilèges, les indulgences de la cour de Rome, les ordonnances pastorales, les acquisitions des propriétés, le dénombrement des fiefs, l’état des personnes dépendantes de l’église, les fondations pieuses, etc. L’ensemble de ces actes jette le plus grand jour sur le régime intérieur de cette métropole et ses rapports avec la société civile. C’est tout à la fois de l’histoire, de l’inventaire, du procès-verbal et de la biographie. M. Guérard, l’éditeur du Cartulaire, dans une préface fort étendue, s’est attaché à mettre en lumière, en les coordonnant et en les expliquant, tous les faits notables dispersés dans le Grand et le Petit Pastoral, le Grand et le Petit Cartulaire, le Livre noir, le Cartulaire du mandé, le Livre des sermens, l’Obituaire et le Pouillé, précieux manuscrits qui donnent comme l’essence même des archives de l’église métropolitaine de Paris, et qui dormaient oubliés dans les dépôts scientifiques de cette capitale. Après avoir montré quel était ; le rôle particulier d’une grande église dans une grande ville, il restait à chercher quel avait été dans la société civile et politique le rôle de la société religieuse tout entière. M. Guérard n’a point négligé cette partie de sa tâche : il a de la sorte éclairé la monographie par la synthèse, et, contrairement à la méthode employée par un trop grand nombre de ses confrères, il s’est élevé du point de vue particulier au point de vue général. Les prolégomènes du Cartulaire se divisent ainsi en deux parties distinctes : l’une relative à l’église Notre-Dame, l’autre relative à l’église universelle, — et, cette division est indiquée d’avance à tous ceux qui, comme nous, voudraient interroger de nouveau l’histoire trop peu connue de la vieille basilique.


I

Depuis quelques années, l’étude des monumens religieux s’est bornée à peu près exclusivement à la partie architectonique ; mais ce n’est là qu’un côté de la question, le côté purement matériel. Représentées par l’association mystique du clergé attaché au service de leurs autels, les églises, durant la période gallo-romaine, furent comme le centre