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pas à la pression diplomatique qui s’exerce sur elles. À tous ces titres, il importe donc de le connaître et d’en constater les résultats.


I

Voyons d’abord l’effet des nouvelles lois sur la marine marchande de l’Angleterre. — Il est très vrai, monsieur, que la plupart des armateurs anglais sont de votre avis. D’après eux, un coup fatal aurait été porté à la prospérité maritime du pays par le bill du 26 juin. Leurs plaintes ont bruyamment retenti dans la chambre haute et dans la chambre basse, soutenues là par la voix éloquente du nouveau comte de Derby (lord Stanley), ici par l’autorité reconnue de M. Herries. Malheureusement pour eux, les armateurs anglais ont plus d’une fois déjà jeté les hauts cris sans motifs et sonné l’alarme à tort. On ne les croit plus sur parole, et l’on ne s’effraie plus de confiance. À l’époque où M. Huskisson signa avec la France le traité du 26 janvier 1826, cette puissante corporation s’éleva aussi avec la plus grande véhémence contre sa témérité. Les intérêts de la marine anglaise étaient trahis ! Le premier élément de la grandeur nationale était livré à tous les hasards ! Les plus sombres pronostics étaient formulés dans les meetings et dans les pétitions sur les conséquences de cette faute. Même dix-huit ans après la conclusion de ce traité, les armateurs, en groupant les chiffres d’une certaine façon, invoquaient, comme aujourd’hui, contre le malheureux ministre, le témoignage de l’expérience, et celui-ci, obligé de se défendre, s’exprimait ainsi dans la séance du 7 mai 1827 : « Sur quels bâtimens la chambre pense-t-elle qu’a porté, en grande partie, l’accroissement qu’on signale dans le tonnage étranger ? Un quart de ces bâtimens jauge moins de 50 tonneaux ; en moyenne, la totalité ne jauge pas 100 tonneaux. Ces bâtimens sont employés aux transports journaliers des côtes de France. Chaque jour, on peut voir à Douvres, à Ramsgate, à Southampton, à Rochester, cette puissante marine marchande apportant, avec des passagers, des oeufs, du beurre, des légumes, de, la volaille, du poisson, des fruits et autres menus articles pour nos marchés. Voilà l’emploi d’un grand quart de ce tonnage, qui grossit le compte des bâtimens étrangers, qui menace, dit-on d’écraser la marine marchande de l’Angleterre ! Un grand nombre arrive avec une marée et repart avec l’autre. Est-ce donc là la pépinière des matelots qui doivent nous faire descendre du rang des puissances maritimes du monde ? M. Huskisson avait mille fois raison. Depuis un quart de siècle que ce traité de 1826 reçoit son exécution, il a été de plus en plus avéré que l’Angleterre n’y avait rien perdu, et que c’était plutôt à la France de s’en plaindre.

Aujourd’hui, les armateurs anglais recommencent les mêmes doléances.