Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 12.djvu/1145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ah! dis-moi, pourquoi donnes-tu,
Nature impénétrable,
— Toi, dont j’admire la vertu
Et l’ordre inaltérable, —

Au paon stupide un si beau corps,
Des yeux doux aux vipères,
Aux insensés des bras si forts,
Tant d’éclat aux panthères?

Une voix si tendre aux crapauds,
Aux renards tant de grâces?
Et pourquoi tant d’hommes si beaux
Ont des âmes si basses?


LA HAIE.


Qu’elle est verte et paisible, au bord de ce sentier,
Cette haie abondante où fleurit l’églantier,
Où sur les aubépins et les pruniers sauvages
Grimpe la clématite aux flexibles branchages!
La rosée a semé les feuilles et les fleurs
De gouttes que le jour peint de mille couleurs.
Dans la haie est caché le nid d’une fauvette;
Sous ce fouillis obscur, on aperçoit sa tête;
Elle est là, familière, et qui couve ses œufs,
Et dans la touffe sombre on voit briller ses yeux.
C’est un monde de paix, de fraîcheur et de joie.
Et le soleil rayonne et le sentier poudroie.
Le vent dort; le buisson, auprès d’un champ de blé,
Repose, et d’aucun bruit son calme n’est troublé
Que des oiseaux chantans, des abeilles ronflantes.
Ou du lézard craintif qui s’enfuit sous les plantes.

Mais voici tout à coup venir par le chemin
Un enfant débraillé, le bâton à la main.
Le chapeau sur l’oreille et sifflant en sourdine;
Il a l’air insolent et la face mutine;
Il vient d’un air vainqueur, le gamin malfaisant.
Et plonge son bâton dans la haie en passant.
Les gouttes de rosée, à travers les épines.
Tombent comme des pleurs sur les herbes voisines,