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la moindre atteinte au pouvoir suprême ; c’est presque toujours pour combattre la politique prudente, mais un peu stationnaire, du parti modéré, qui, en ce moment, et depuis quelques années, se trouve à la tête des affaires. Il y a eu pendant long-temps au Brésil un autre parti puissant qui n’aspirait à rien moins qu’à placer sur le trône la sœur aînée de dom Pedro II, dona Januaria, âgée maintenant de vingt-neuf ans, et mariée au comte d’Aquila, frère du roi de Naples. Ce parti a complètement disparu depuis la majorité de l’empereur. La régence a eu à lutter contre quelques tendances républicaines qui ne se sont manifestées que par des révoltes de province. Aujourd’hui, la faction démocratique avancée ne compte plus qu’un très petit nombre d’adhérens au Brésil. Les voyages de dom Pedro dans les provinces du sud ont beaucoup contribué à rallier tous les partis autour du trône.

L’attachement politique des provinces au gouvernement de l’empereur est presque toujours subordonné à leur importance commerciale. Celles dont les dépenses excèdent les recettes, et qui ont besoin de l’assistance du pouvoir central, lui sont généralement dévouées. Il n’en est pas de même de celles qui, plus ou moins florissantes, grace à un excédant annuels peuvent se passer de l’appui du gouvernement et lui faire opposition comme il leur plaît. La province de Rio de Janeiro, siége du pouvoir central, doit à la condition exceptionnelle de ses habitans la tranquillité dont elle jouit. Au Brésil les révoltes ne sont pas occasionnées comme chez nous, par les agitations populaires, mais par le mécontentement des classes aisées, et la ville de Rio, habitée soit par des étrangers adonnés au commerce, soit par une tourbe d’ambitieux, amis de tous les pouvoirs, qui n’ont aucun intérêt aux bouleversemens politiques, jouit d’un calme qui ôte aux agitations du reste de l’empire beaucoup de leur portée.

La politique du gouvernement brésilien, même quand l’administration passe aux mains des libéraux, est, on le voit, une politique d’ordre et de conciliation, une politique essentiellement modérée. Il n’a qu’à encourager, à maintenir dans une voie de progrès régulier une population qui naît à la vie, intellectuelle. Ce n’est que dans la sphère des intérêts matériels et internationaux que son rôle se complique et s’élève tout à la fois. Avant de le suivre sur ce terrain, il faut toutefois nous arrêter encore dans le domaine de la politique intérieure, et voir quel secours prête à l’administration brésilienne l’ingénieux mécanisme des institutions de l’empire, quelles tendances hostiles ou favorables le gouvernement rencontre dans la pression de l’opinion publique.

Le conseil d’état brésilien est compose de vingt-quatre membres, douze ordinaires et douze extraordinaires. À quelques légères différences près, il repose sur des bases analogues à celles de notre conseil d’état. Ses attributions principales consistent à seconder la couronne dans l’exercice du pouvoir modérateur, et le gouvernement dans la pratique du pouvoir exécutif. Il faut, pour devenir membre du conseil d’état, remplir les conditions que la loi impose aux sénateurs. L’héritier présomptif du trône en fait partie de droit à l’âge de dix-huit ans, et les autres princes peuvent y être admis sur la présentation de l’empereur. Le sénat brésilien se compose d’un nombre limité de membres nommés à vie. Ce nombre est égal à la moitié de celui des députés représentant les dix-huit provinces de l’empire. S’agit-il d’élire un sénateur, on présente au chef du pouvoir exécutif les noms de trois candidats qui ont obtenu le plus grand nombre de