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il abroge et abolit, dans la plénitude de son pouvoir apostolique, toutes les constitutions antérieures, quelque ancienne qu’en soit la date, et il décrète que sa présente lettre sera tenue pour supérieure à tout ce qui lui serait antérieur, en un mot à tout ce qui lui serait contraire. En même temps, le cardinal Wiseman, dans sa lettre pastorale datée de Rome, disait : « La grande œuvre est accomplie. Votre cher pays a repris sa place parmi les brillantes églises qui, régulièrement constituées, forment l’agrégation splendide de la communion catholique. L’Angleterre catholique est restituée à son orbite dans le firmament de l’église, d’où sa lumière avait depuis si long-temps disparu, et elle reprend maintenant sa course régulière autour du centre de l’unité. »

Ni le pape, ni le cardinal, ne tenaient donc plus aucun compte de l’église anglaise ; à leurs yeux, elle n’était plus même schismatique, elle n’était rien. C’est contre cet effacement absolu que nous avons vu protester les évêques anglais et le parti orthodoxe et apostolique. Cependant les évêques se plaignaient amèrement d’une agression qui était, selon eux, fratricide, qui était une violation des doctrines de l’église catholique elle-même et des principes qui avaient toujours guidé les rapports des sociétés chrétiennes entre elles. C’est à ce propos que l’évêque de Londres disait : « Le pape commet une usurpation en traitant comme des zéros les anciens archevêques et évêques d’Angleterre, reconnus, comme ils l’ont été, par ses prédécesseurs, bien qu’existant indépendamment d’eux… Ce qu’il a fait est une violation palpable des lois de l’église catholique, même de cette portion qu’il gouverne. »

Comme on le voit, l’église d’Angleterre se considère ici comme une des branches de l’église universelle, se rattachant au tronc primitif par une succession non interrompue depuis l’introduction du christianisme dans la Grande-Bretagne. Elle prétend être la véritable église apostolique. Nous avons d’abord, dit-elle, subsisté ici comme église indépendante, puis nous avons été, pendant un temps, en communion avec l’église de Rome, puis cette église a voulu usurper sur nous un pouvoir illégitime, et alors, au temps de la réformation, nous avons secoué ce joug ; mais nous avons été comme l’or purifié : nous sommes restés essentiellement ce que nous étions. Nous sommes toujours le jardin du Seigneur, dont les ronces ont été arrachées.

Voilà ce que dit la véritable église anglaise, et on a vu que Rome, de son côté, avait toujours semblé ne pas la mettre au ban de la catholicité, et ne pas vouloir fermer à jamais sur elle la porte de la paix. Quelles sont les raisons qui ont déterminé le saint-siège à consommer la rupture et à briser d’une parole, d’un trait de plume, les derniers liens qui rattachaient encore l’église anglaise à l’église catholique ? Nous croyons qu’il faut les chercher, non plus dans la considération