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Ainsi le lendemain et d’autres jours ensuite
Revint la belle esclave aux yeux de diamant,
Qui, prenant sa ceinture à Vénus Aphrodite.
Muse capricieuse, inspirait son amant.
Chaque jour promettait des voluptés meilleures :
Tantôt elle chantait une douce chanson,
Ou, par ses doux propos diminuant les heures,
Transformait en palais les murs de la prison,
Et, tantôt ébranlant le sol sous ses pieds roses.
Elle précipitait ses pas impétueux,
Ou, savante à former de gracieuses poses.
Tordait comme un serpent son corps voluptueux.

Par quels obscurs détours, procède le génie !
La nature vaincue obéit à ses mains,
D’élémens opposés il tire l’harmonie,
Il sait transfigurer les visages humains.
Il invente, il copie, il crée, il interprète,
Toujours grand, toujours fort dans sa fécondité.
Et surprenant aux dieux leur puissance secrète,
Varie infiniment l’éternelle beauté.
Le mur s’est animé de peintures nouvelles
Voici la Poésie au front doux et voilé,
Conduisant sur ses pas les Graces immortelles ;
Puis la Danse lascive, au front échevelé,
Svelte, le pied hardi, la jambe découverte.
Défiant du regard les Amours curieux ;
Puis la Musique enfin, plus tendre et moins alerte.
Le visage gonflé d’un souffle harmonieux,
Pressant contre sa lèvre une flûte sonore
Qui de la voix humaine imite les douceurs.
Les voilà toutes trois : Erato, Therpsichore,
Euterpe ! — D’un regard on les devine soeurs,
Ou mieux on reconnaît une déesse triple,
Sous différens aspects déployant sa beauté,
Animant ces trois corps de sa grace multiple,
Et semblable toujours dans sa variété :
C’est encore Myrrha, mais diversement belle,
Myrrha, qui, de l’artiste enivrant les regards,
Réalisait ainsi cette fable immortelle
De la blonde Vénus enchaînant les beaux-arts.

Agatharque, endormi dans l’amour et l’étude,
À ses refus passés songeait plus mollement ;