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des wagons à eau, accompagné aussi de deux hommes. Arrivé au sommet du plan incliné, le convoi laisse derrière lui les wagons à réservoir, dépasse ceux du second plan incliné comme il l’a fait au précédent, emmenant les deux hommes des wagons vides qui vont monter.

« Ainsi tous les hommes ont changé de place ; le devoir de chaque couple est de vider les derniers wagons-réservoirs descendus et de remplir les autres. En s’y prenant convenablement, la même eau peut servir à plusieurs plans. De fait, le même convoi supplémentaire de wagons à réservoir pourrait passer d’un plan à un autre, ce qui serait une économie de capital ; mais, pour les convois de passagers, il vaut mieux que chaque train de wagons à réservoir reste constamment attaché à son câble, afin d’éviter les risques et les retards qu’il y a à attacher et à détacher un pareil convoi chaque fois qu’un plan incliné doit être franchi.

« Le personnel nécessaire pour desservir une série de plans inclinés est donc de deux hommes au pied du plan inférieur. Entre les passages des convois, ces hommes sont employés à l’entretien du chemin de fer et à réparer et graisser les machines.

« Il est bon de rappeler que l’on doit toujours connaître le poids du convoi qui va monter, pour savoir quelle est la quantité d’eau qu’il faut verser dans les wagons à réservoir. »

Si jamais on entreprend de passer les Alpes au moyen des chemins de fer, ce ne pourra être que par une succession de plans inclinés ; autrement il faudrait revenir à l’idée de tunnels de plusieurs lieues de longueur, dont on ne saurait calculer à l’avance toutes les conditions ni prévoir tous les résultats.

On voit que le système proposé par M. Stephenson pour la manœuvre des plans inclinés consiste à faire descendre les convois par le moyen de la pesanteur, et à les faire remonter par le secours de wagons-réservoirs qu’on remplit d’eau, au sommet de chaque plan incliné, pour leur donner plus de poids, et qui, étant ainsi devenus fort lourds, déterminent par leur descente le mouvement ascendant du convoi de marchandises ou de voyageurs qui est au bas. Une fois au bas du plan, les wagons-réservoirs sont vidés de l’eau qu’ils contiennent, et alors on a peu de peine à les faire remorquer eux-mêmes en même temps que le premier convoi ascendant qui se présente. C’est une application ingénieuse du principe de ce qu’on nomme les plans inclinés automoteurs qui sont en usage sur des chemins de fer destinés à l’exploitation des mines de houille, et sur lesquels les convois descendans chargés de houille remorquent les convois ascendans qui se composent de wagons vides ; il existe un exemple admirable de ces plans automoteurs sur le territoire des mines de la Grand’Combe, où M. Bourdaloue les a adaptés aux besoins du service avec un succès rare et une grande économie. L’application même que projette M. Stephenson pour la Suisse a déjà la sanction de l’expérience. Il y a près de vingt ans que M. Monture Robinson l’a mise en usage aux États-Unis sur les plans inclinés du chemin de fer de Pottsville à Sunbury en Pensylvanie, dont les pentes, avons-nous dit, vont jusqu’à 30 pour 100. On peut voir la description minutieuse des mécanismes établis par cet ingénieur éminent, ainsi que celle de la manœuvre, dans le texte et l’atlas de l’Histoire des voies de communication aux