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Port-d’Urban, qu’il n’osait pas attaquer, mais qui commençaient à lui inspirer des inquiétudes.

En conséquence et vers le milieu d’octobre, c’est-à-dire au commencement de l’été dans l’hémisphère austral, Retief, voyant prospérer les affaires de ses compatriotes, partit pour Port-Natal. Sa première visite fut pour les Anglais, et peut-être était-ce une faute : les démonstrations avec lesquelles il fut accueilli par eux ouvrirent les yeux à Dingaan et lui firent comprendre qu’il ne réussirait jamais à opposer les blancs aux hommes de leur race. Aussi, quand Retief se rendit auprès de lui, ne put-il rien obtenir que de vaines paroles. Dingaan le traitait avec tous les signes extérieurs du respect et même de l’amitié ; mais, lorsque Retief lui parlait de conclure un traité définitif, le chef zoulou avait toujours à lui opposer quelque nouvelle fin de non-recevoir et renvoyait la conclusion définitive à quelques mois, si bien que Relief, rappelé aux campemens par la nécessité des affaires intérieures, dut partir sans avoir rien terminé. Toutefois les négociations n’étaient pas rompues ; elles étaient ajournées à la fin de la saison, au mois de février suivant.

Que fit pendant ce temps Dingaan ? Il se réconcilia avec Matzellikatze, il traita avec d’autres chefs pour former une ligue dont l’objet était l’extermination des blancs. Malgré le secret avec lequel il s’efforça de conduire ces intrigues, il en revint quelque chose aux Boers, et l’on a peine à comprendre comment Retief, averti par tous les bruits qui circulaient, alla se livrer lui-même aux assassins ; mais il tenait tant à son projet, il en espérait tant pour l’avenir des siens, il avait tant de confiance dans sa bravoure, qu’il ne voulut pas manquer au rendez-vous. Supplié de rester, il traita de chimériques les défiances de ses amis, et le 3 février, accompagné d’une escorte de soixante-dix volontaires et de trente domestiques, il arriva avec deux cents chevaux au camp de Dingaan.

Celui-ci avait pris ses mesures et se préparait à agir. Pendant les trois premiers jours, il reçoit les Hollandais avec beaucoup d’honneurs, il négocie avec eux, il signe même un traité qui comblait tous les vœux du chef des Boers ; mais le 6 au matin, au moment où ils recevaient leur audience de congé, les Hollandais, surpris et désarmés, sont égorgés jusqu’au dernier. « Ils étaient en train de seller leurs chevaux pour retourner chez eux après la signature du traité, dit un Anglais de Port-Natal qui tenait ces détails d’un Zoulou témoin oculaire, lorsqu’on vint les inviter à prendre congé du roi, à boire avec lui le coup de l’étrier, mais sans emporter leurs fusils. Pendant qu’ils buvaient la bière et le lait que Dingaan leur avait fait servir dans une cour de sa résidence, une multitude de barbares se précipitèrent sur eux, et, après s’être assurés de leurs personnes, les menèrent à un mille de là,