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les autres souverains de l’Italie, le roi de Naples excepté, avaient suivi cet exemple. La résistance du roi de Naples avait amené un soulèvement et fait couler le sang. Dans les états lombardo-vénitiens enfin, toutes les ames frémissaient. La conspiration était en permanence Milan et à Venise, et le maréchal Radetzky, frappé du changement et de l’exaltation des esprits, proposait déjà à son gouvernement des mesures militaires d’une remarquable audace et d’une extrême énergie. Le voyage à travers la péninsule d’un des plus grands personnages de l’Angleterre, lord Minto, envoyé parle Foreign Office pour conseiller aux gouvernemens de la péninsule la modération et la prudence, avait produit sur les imaginations italiennes un effet extraordinaire. De même que Pie IX avait été transformé par les Italiens en un régénérateur politique, de même le noble lord avait été pris, quoi qu’il en eût et quoi qu’il dît, pour un agitateur et un conspirateur. Enfin tous les signes d’une révolution prochaine étaient visibles, et la cour de Rome se trouvait compromise, par la lenteur et l’incertitude de sa conduite, au plus épais et au plus dangereux de cette révolution.

Enfin la crise éclata, et elle éclata dans celui de tous les états d’Italie d’où on s’attendait le moins à la voir sortir, dans l’état de Naples. Le 23 janvier 1848, le roi Ferdinand, effrayé des progrès de l’esprit d’insurrection en Sicile et dans ses possessions de terre ferme, fit à ses sujets la solennelle promesse d’une constitution ; le 29, la constitution était publiée. Comment résister à Florence et à Turin après l’exemple donné par le roi de Naples ? Il fallut céder. La Toscane et le Piémont eurent leurs constitutions. L’hésitation cependant était grande à Rome, car une difficulté redoutable venait là compliquer la question : c’était la difficulté de savoir si le régime constitutionnel, qui venait pour ainsi dire d’éclater dans tous les états d’Italie, était une forme de gouvernement compatible avec l’existence de la souveraineté pontificale. Tel était le problème. Comme, au milieu de l’agitation croissante des esprits et de l’affaiblissement de plus en plus rapide de sa popularité et de son pouvoir, le cardinal Ferretti, profondément troublé, ne savait à quoi se résoudre, une nouvelle formidable arriva tout d’un coup : le 24 février au soir, la république venait d’être proclamée à Paris. Le ciel entier de l’Europe retentit de ce coup de tonnerre, et en fut bouleversé : tous les gouvernemens existans chancelèrent, et bientôt, suivant l’un des premiers l’exemple universel, l’ancien pouvoir politique du saint-siège tomba. Le 10 mars, le cardinal Ferretti résigna ses fonctions ; le 14, une constitution fut octroyée par le saint père à ses sujets, et un cabinet presque entièrement composé de laïques, et où ne figuraient que des hommes ou connus par leur libéralisme ou protestant de : leur attachement profond à l’ordre de choses nouveau, remplaça aux affaires le ministre réformiste, si populaire sept mois auparavant, qui