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LES POPULATIONS OUVRIÈRES.

blissement, où elle existe depuis 1821, sert aux déposans un intérêt de 5 pour 100. Pour certaines catégories d’ouvriers, l’épargne est rendue obligatoire : les jeunes filles de la filature, par exemple, doivent laisser un douzième de leur salaire, qu’elles ne touchent avec les intérêts accumulés qu’au moment où elles quittent la fabrique, c’est-à-dire ordinairement à l’époque de leur mariage. Ces économies, insensiblement réalisées, leur préparent une petite dot qui contribue aux frais de premier établissement du ménage, et empêche de contracter alors des dettes que plus tard il est toujours si difficile d’éteindre. Les opérations de la caisse sont, du reste, en progrès. L’action de la caisse d’épargne de Wesserling, qui vient de l’initiative des patrons, est complétée par la création des caisses de secours mutuels, qui sont l’œuvre des ouvriers eux-mêmes. Wesserling compte aujourd’hui cinq sociétés de ce genre, dans lesquelles on avait abordé, avant 1848, le problème des retraites pour les invalides du travail. Les chefs de l’usine contribuent au maintien de ces institutions, soit en versant dans la caisse mutuelle le produit des amendes disciplinaires, soit en tenant compte un intérêt de 5 pour 100 pour les fonds déposés entre leurs mains, soit enfin en consacrant eux-mêmes une certaine somme au service des pensions. Il existait dans l’établissement jusqu’à ces dernières innées une caisse de prêt destinée à venir en aide aux ouvriers qui voulaient acheter quelque petite propriété. On se bornait à exiger la caution solidaire d’un des déposans à la caisse d’épargne ; mais ces avances prirent bientôt un essor tout-à-fait exagéré, et montèrent en une seule année à plus de 125 000 francs. On reconnut que les familles ouvrières s’étaient lancées à l’aveugle dans des acquisitions dépassant leurs moyens. On a dû dès-lors restreindre les facilités accordées ; mais, en voulant prévenir un abus, on a resserré ces facilités dans une limite qui semble beaucoup trop étroite.

L’action de l’établissement, en ce qui concerne les subsistances, ne s’exerce ni par des achats de denrées alimentaires ni par l’entretien d’une boulangerie intérieure. À la suite des mauvaises récoltes de 1845 et 1846, on avait un moment recouru à cette aide directe ; mais on y a renoncé assez promptement pour revenir à l’ancien mode, encore en vigueur aujourd’hui, et qui consiste à garantir aux boulangers le paiement des fournitures faites par eux, à exercer un contrôle sur la qualité et le poids du pain, et à obtenir un rabais sur le prix de vente. Ce système est universellement approuvé, car tous les ouvriers tiennent à prendre leur pain dans l’usine, où les boulangers sont obligés de l’apporter. Satisfaire aux besoins matériels, telle a été la première préoccupation des chefs de ce clan. Ils ont pourtant songé aussi, en une certaine mesure, à développer l’instruction primaire. Quoique sautes les communes de la vallée où résident les familles ouvrières