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magistrats la pervertissent et l’ébranlent ! -Ils en étaient là quand un domestique d’Onégèse ouvrit l’enceinte de la maison : Priscus quitta l’inconnu, qu’il ne revit plus.

L’insistance que mettait Théodose à demander Onégèse pour négociateur dans ses différends avec les Huns tenait à un double calcul de la politique byzantine : d’abord on semblait repousser Édécon comme trop rude et trop dévoué aux intérêts de son maître, puis, à tout événement, on espérait attirer par les séductions et peut-être corrompre par l’argent le ministre tout-puissant qui montrait une bienveillance si pleinement gratuite à l’empire. De ces deux calculs, l’honnête Maximin ignorait le premier et soupçonnait à peine le second ; mais cette partie de sa mission lui avait été recommandée comme une de celles auxquelles l’empereur tenait le plus, et il ne supposait pas qu’une telle avance de la part d’un tel souverain pût laisser le Barbare indifférent. Onégèse, après avoir donné un coup d’œil rapide aux présens que Priscus lui apportait, les fit déposer dans sa maison, et, apprenant que l’ambassadeur romain voulait se rendre chez lui, il tint à le prévenir lui-même ; au bout de quelques instans, Maximin le vit entrer sous sa tente. Alors commença entre ces deux hommes d’état une conversation dans laquelle le caractère du ministre d’Attila se déploya tout entier. Maximin s’attacha à lui exposer avec quelque peu d’emphase que le moment d’une pacification solide entre les Romains et les Huns paraissait arrivé, pacification dont l’honneur était réservé à sa prudence, et que l’utilité très grande dont le ministre hun pouvait être pour les deux nations se reverserait sur lui-même et sur ses enfans en bienfaits perpétuels de la part de l’empereur et de toute la famille impériale. -- Comment donc, demanda naïvement Onégèse, ce grand honneur peut-il m’advenir, et comment puis-je être entre vous et nous l’arbitre souverain de la paix ? — En étudiant, reprit l’ambassadeur, chacun des points qui nous divisent et les conventions des traités, et pesant le tout dans la balance de votre équité. L’empereur acceptera votre décision. — Mais, rétorqua celui-ci, ce n’est point là le rôle d’un ambassadeur, et, si je l’étais, je n’aurais pas d’autre règle que les volontés de mon maître. Les Romains espéreraient-ils par hasard m’entraîner par leurs prières à le trahir, et à tenir pour néant ma vie passée parmi les Huns, mes femmes, mes enfans nés chez eux ? Ils se tromperaient grandement. L’esclavage me serait plus doux près d’Attila que les honneurs et la fortune dans leur empire. — Ces paroles, prononcées d’un ton calme, mais net, ne souffraient point de réplique. Onégèse, comme pour en adoucir la rudesse, se hâta d’ajouter qu’il était plus utile aux Romains près d’Attila, dont il apaisait quelquefois les emportemens, qu’il ne le serait à Constantinople, où son bon vouloir pour eux ne