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qui les inspirait tous, s’était installé à Rome et y organisait les élections.

Le gouvernement rivalisait d’extravagance et de violence avec ce comité. Il multipliait les lois et les mesures révolutionnaires, copiant tous les décrets de 1793 ou du gouvernement provisoire de Paris en février 1848. Il envoyait des commissaires extraordinaires dans les provinces pour assurer (on sait ce que ces mots dans certaines bouches veulent dire) la sincérité des élections. Il couvrait le pays de comités de salut public chargés, disait-il, d’assurer la rapide et inflexible exécution des lois. Il créait une commission militaire investie d’un pouvoir discrétionnaire sans appel, dont les sentences étaient exécutoires dans les vingt-quatre heures, et qui avait pour mission de rechercher ou de punir tout attentat ou pensée d’attentat qui paraîtrait tendre à renverser la forme du gouvernement. Laquelle ? puisque tout était en suspens. Et voilà la conduite de gens dont toute la vie s’était passée à appeler l’indignation de l’Europe sur les cruautés de Grégoire XVI Leur premier usage du pouvoir était de rendre une loi de suspects et de faire des procès de tendance ! On pense bien que les finances n’étaient pas oubliées par ces grands régénérateurs ; ils avaient émis pour 600,000 écus de papier-monnaie, hypothéqués, disaient-ils, sur les biens de l’apanage ; ils avaient bouleversé tout le système des impôts, supprimé les revenus indirects, etc., etc.

Cependant le jour fixé pour l’ouverture de la constituante approchait. Il arriva enfin. Dès les premières séances de l’assemblée, il fut évident que les commissaires extraordinaires et les comités de salut public avaient rempli avec le plus grand bonheur la tâche dont on les avait chargés. La majorité était aussi révolutionnaire qu’il était possible de le désirer. Des discussions de clubs remplirent les séances, jusqu’à ce que, dans la nuit du 9 février, 120 voix sur 142 membres présens votèrent un décret qui déclarait la papauté déchue en fait et en droit du pouvoir temporel des États Romains, sous la réserve des garanties nécessaires à son indépendance dans l’exercice de son autorité spirituelle, et proclamait la république démocratique la forme légale du gouvernement. Cette suprême folie avait du moins, il faut le reconnaître, le mérite de la logique. Voulant constituer l’anarchie, les constituans romains ou leurs meneurs ne pouvaient choisir une forme de société politique plus favorable à leurs desseins que la république démocratique : il n’y a pas de constitution d’état au monde qui se prête plus aisément à la dictature du désordre.

La proclamation de la république fut immédiatement suivie de la nomination d’un comité exécutif composé de trois Italiens responsables et amovibles à la volonté de l’assemblée, et qui furent MM. Armellini, Montecchi et Saliceti. Ce comité s’adjoignit un ministère dont