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de l’Annuaire des Deux Mondes, notamment ceux du sultan Abdul-Medjid et du général Rosas, avec les caricatures qu’elle met à la place dans la contrefaçon belge, qui n’a pas encore paru intégralement - depuis six mois que l’édition originale circule dans toute l’Europe.

Voilà les perfectionnemens que des contrefacteurs sans goût et sans littérature prétendent avoir ajoutés à une œuvre considérable, qui a coûté tant de travaux à la rédaction de la Revue ! Quant aux modifications que les contrefacteurs Cans et Meline se sont permis de faire à cet Annuaire, elles consistent en véritables soustractions, en falsifications et en additions intéressées que les auteurs de l’Annuaire des Deux Mondes dénoncent encore au monde littéraire et aux défenseurs autorisés du droit international intellectuel, qui veut qu’on n’attribue pas à des écrivains ce qu’ils n’ont pas écrit ni voulu écrire. C’est là ce qu’il est bon d’apprendre à ces trafquans sans droit des œuvres d’autrui, à ces violateurs insolens du nom et de la propriété de nos écrivains.

À la vérité, les éditeurs belges de l’Annuaire, — c’est ainsi vraiment qu’ils se nomment, — ont tenu à mettre dans leur contrefaçon quelque chose qui fût de leur crû. Comme pour justifier le reproche d’ignorance et de falsification que nous leur avions adressé dans ce livre même, ils y ont introduit des erreurs grossières avec quelques bribes pillées çà et là dans les journaux belges et français. Ils paraissent fiers surtout d’une transposition de chapitres dont le résultat est de rompre l’économie du plan : ils ont eu l’ingénieuse idée de détacher la Belgique des pays de race latine et de l’éloigner du voisinage de la France, pour la placer parmi les peuples germaniques, entre le Danemark et la Hollande, afin d’insulter du même coup la géographie, l’histoire et le bon sens. Ils nous enseignent que, si de Dunkerque à Maestricht, on tire ce que dans leur langage welche ils appellent une ligne un peu flexueuse, on partage la Belgique en deux zones ; et comme les populations de l’une de ces zones parlent, disent-ils, l’idiome thiois, ils en concluent que la constitution belge n’est point écrite en français, que l’on ne discute point en français dans les chambres belges (cela est peut-être vrai pour le député Cans ), que la Belgique en un mot, en dépit de ses traditions et de son génie, n’appartient point à la famille latine, et qu’elle tient justement le milieu entre la Scandinavie et l’Allemagne. Voilà ce que l’on démontre avec l’argument triomphant de la ligne un peu flexueuse et de l’idiome thiois ! Entraîné par son enthousiasme, le Vadius welche oublie jusqu’à son industrie, qui est peut-être la meilleure preuve qu’il vit au milieu d’une race française. — Est-ce en effet notre littérature ou la littérature germanique que vous détroussez depuis vingt ans ?

Les contrefacteurs sont peut-être encore moins heureux dans les rectifications de noms et de faits qu’ils ont tentées à plusieurs endroits, afin d’avoir l’air de comprendre ce qu’ils copiaient. Ils ont imaginé, par exemple, de suivre généralement l’orthographe allemande pour les dénominations d’hommes et de villes, au lieu d’adopter avec notre Annuaire l’orthographe particulière à chaque pays. C’est ainsi qu’ils substituent partout au mot danois Slesvig le mot allemand Schleswig. Ils pensent de même nous apprendre que l’héritier de la couronne de Russie porte un titre officiel qu’ils écrivent césarewitch. Puisqu’ils se piquent de raffiner, nous sommes obligés de leur dire que ce mot n’est pas plus russe que français. C’est tsésarévitch qu’ils devaient écrire. Ne nions point cependant leur génie inventif ; ils ont fait une découverte : l’impératrice