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est devenu le plus actif et le plus zélé promoteur de la réforme qui vient d’être décrétée[1]. Envoyé en Allemagne pour constater les résultats les plus récens, M. Josseau a publié un livre qui complète et éclaire les travaux un peu confus de M. Royer. Il y a dix-huit mois enfin qu’un projet de loi, inspiré par l’association centrale, mit sérieusement la question à l’ordre du jour. Renvoyé au conseil d’état selon l’usage, ce projet y donna lieu à une enquête habilement dirigée par M. Vivien, et dont il restera un livre des plus instructifs à consulter sur cette matière. En même temps, une commission extraordinaire de trente membres avait été nommée pour aviser à la réforme hypothécaire et au soulagement de la propriété par le moyen du crédit. Après avoir refondu le plan ministériel, cette commission consigna ses propres idées dans un volumineux rapport, rédigé par M. Chegaray.

La révolution du 2 décembre ayant coupé court aux travaux parlementaires, un comité de six personnes reçut ordre de reprendre et de poursuivre plus activement que jamais les études relatives au crédit foncier. Enfin un décret en date du 28 février a posé les bases de l’institution, et avant peu de jours la grande affaire sollicitée depuis si long-temps, et si souvent promise, sera en voie d’expérience.

À notre tour, nous prenons à tâche de résumer cette controverse de quinze années, en disant comment les institutions de crédit foncier se sont développées, en quoi elles consistent, et de quelle utilité elles peuvent être chez nous, dans l’état actuel de la propriété et du crédit public. Comme il s’agit d’une innovation à laquelle toutes les familles peuvent se trouver intéressées, nous ne craindrons pas, malgré l’aridité de la matière, d’entrer dans quelques détails techniques et d’insister sur certaines explications.


I. – ORIGINE ET DEVELOPPEMENT DU CREDIT FONCIER.

Deux conditions sont essentielles pour constituer le crédit : il faut que celui qui emprunte offre un gage d’une solidité incontestable ; il faut que celui qui prête ait facilité de rentrer dans son capital aussitôt qu’il en éprouve le besoin.

Dans le crédit commercial, une banque prend à l’escompte un billet portant, entre autres signatures, celle d’un négociant qui lui confie en dépôt d’importantes valeurs, et dont elle est ordinairement la débitrice. Elle classe dans son portefeuille le billet escompté, et le remplace dans la circulation par son propre billet, que le public accepte comme argent comptant. Or, de cette double opération il résulte que la banque n’a aucune perte à redouter, puisqu’elle est préalablement

  1. M. Josseau a eu pour collaborateur, dans plusieurs de ses travaux, M. A. Delaroy, avocat, que l’association centrale avait choisi pour son secrétaire.