Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 13.djvu/929

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’aurait plus à craindre les frais, les retards, les chances de perte qu’entraîne une procédure en expropriation, en cas de non-paiement. En retour de ces avantages, il aurait peut-être à subir une légère diminution sur le taux de l’intérêt ; mais, par compensation, il aurait chance de réaliser un bénéfice sur le capital, si les titres négociés à la Bourse s’élevaient au-dessus du pair, ainsi qu’il arrive communément au-delà du Rhin.

Le rôle de l’agence intermédiaire étant défini en ces termes, la première question à résoudre est celle-ci : Y aura-t-il une seule association pour toute la France, ou bien y en aura-t-il plusieurs ? Quelques personnes préfèrent qu’à l’exemple de ce qui se passe en Allemagne, les sociétés françaises soient multiples et locales. Il serait impossible, à les entendre, d’appliquer à la France entière des statuts uniformes ; la nature, les besoins et les ressources de la propriété y sont trop dissemblables. On conçoit, disent-elles, qu’un petit pays comme la Belgique centralise les opérations entre les mains de l’état ; mais comment une seule administration, une agence particulière, pourrait-elle surveiller tous les biens engagés sur l’immense surface de notre territoire ? En supposant qu’elle y parvînt, et que la conversion des titres hypothécaires s’opérât sur une large échelle, une société de particuliers, ayant plusieurs centaines de millions de rentes à servir, primerait en importance financière le trésor public. Certes, ces objections ne sont pas sans gravité ; mais, d’un autre côté, si de nombreuses associations se partageaient le territoire, la circulation des titres se restreindrait à la sphère de chacune d’elles : le défaut de concurrence, dans les régions où le capital est rare, y avilirait peut-être le cours des lettres de gage. Au lieu d’un cours unique, comme pour les rentes sur l’état, il y aurait, pour les rentes foncières, autant de cotes que de sociétés. On compromettrait ainsi le principal avantage de la réforme hypothécaire, qui est d’abaisser uniformément et progressivement le taux des emprunts contractés par la propriété.

Entre les partisans d’un établissement unique et ceux qui préfèrent la pluralité des compagnies, l’association centrale a cherché à faire prévaloir un système mixte tendant à conserver les avantages de la centralisation, tout en laissant aux propriétaires une part suffisante d’indépendance. Elle demandait que l’on constituât d’abord une société-mère, ayant son siège à Paris, et opérant dans toute l’étendue du ressort de la cour d’appel. Autour de cet établissement modèle, les sociétés régionales se seraient fondées avec liberté de choisir leurs administrateurs et d’approprier leurs statuts aux besoins de la localité. Toutefois elles ne devaient agir que sous le contrôle et la responsabilité de la société-mère quant à l’émission de leurs papiers et à l’importance de leur remboursemens. Il y aurait eu ainsi unité de type et garanties égales pour les lettres de gage, quelle que fût leur origine.