Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 13.djvu/981

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rien moins que la transformation du régime pénitentiaire. On sait à quel point cette grave question a préoccupé les esprits les plus réfléchis, et combien d’études ont été faites pendant long-temps pour arriver à un résultat qui réunît tout à la fois des conditions de travail, de moralisation pour les condamnés, sans rien enlever à l’efficacité de la justice humaine. C’est à vrai dire le fruit de ces études approfondies qui vient d’être traduit en un décret, lequel a pour but de créer à Cayenne une colonie pénitentiaire, formée avec les hôtes de Rochefort et de Brest. Déjà même les condamnés de Rochefort paraissent avoir été extraits de leur bagne et embarqués. Nous ne savons si la nouvelle colonie est matériellement en mesure de recevoir si promptement cette dangereuse bande. Nous ignorons, d’un autre côté, si le travail sera assez puissant pour faire luire quelque éclair moral dans ces ames dégradées. C’est l’expérience que nous allons tenter après l’Angleterre. Toujours est-il qu’il reste un double intérêt dans la réalisation de cette pensée : c’est la suppression de cette lèpre des bagnes, où les natures déjà perverties atteignent à des prodiges d’ignominie, et où les natures à demi flétries par le crime achèvent de se pervertir ; en outre, c’est une tentative de colonisation sur le territoire infructueux d’une de nos possessions américaines. — Nous pourrions ajouter à cette mesure quelques autres actes d’un genre différent, tels que diverses concessions de chemins de fer. La compagnie du Nord est autorisée à ouvrir quatre lignes nouvelles, s’embranchant par divers points au réseau qui couvre déjà ces départemens, et dirigées, — l’une de La Fère à Reims, l’autre de Saint-Quentin vers la frontière belge par Maubeuge, une troisième sur le port de Saint-Valery, la quatrième enfin du Cateau à Somain, destinée à relier les ports de la Manche avec le nord-est de la France. Il serait aussi question, assure-t-on, de concessions prochaines de lignes de fer dans le midi, notamment entre Toulouse et Bordeaux, ce qui, joint aux œuvres déjà commencées, ne laisse point que de faire un total considérable. Dans ce grand nombre de travaux, si utiles d’ailleurs à l’industrie et au commerce, et qui viennent solliciter l’activité matérielle du pays, n’est-il pas seulement à souhaiter qu’on ne s’écarte point d’une double pensée - celle de l’achèvement de nos grandes voies de communication, et aussi la prévoyance des difficultés financières qui peuvent naître de cette multitude d’entreprises simultanément poursuivies ? On sait de quel poids pèsent souvent ces difficultés dans les situations politiques.

Si la France a subi de profonds changemens dans son régime intérieur, il y a des contre-coups qui peuvent paraître inévitables dans son action extérieure, dans ses rapports internationaux. Des événemens comme ceux qui ont signalé ces derniers temps ne se produisent pas sans avoir leur retentissement et leurs conséquences au dehors. Il y a long-temps qu’on a dit que, quand la France se remuait, le monde était en mouvement. Que ce soit pour suivre l’impulsion ou pour y résister, peu importe : il y a toujours une multitude de questions qui se déplacent et changent soudainement d’aspect. Le contre-coup de ces mouvemens se fait surtout sentir naturellement dans des pays qui, comme la Belgique, tiennent à la France par des liens indissolubles, par mille intérêts politiques, industriels, commerciaux. Nous ne nous dissimulons en rien ce qu’il y a de grave, de difficile, de délicat dans la situation politique de la Belgique vis-à-vis de la France. C’est pour nous un motif de plu s de croire à l’efficacité