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LES FÊTES DE MAI


EN HOLLANDE.




I. – BRUXELLES ET IXELLES.

Hoffmann parle d’un promeneur solitaire qui avait la coutume de rentrer dans la ville à l’heure du soir où la masse des habitans en sortait pour se répandre dans la campagne, dans les brasseries et dans les bals, parés ou négligés que l’étiquette allemande distingue si nettement. — Il était forcé alors de s’ouvrir avec ses coudes et ses genoux un chemin difficile à travers les femmes en toilette, les bourgeois endimanchés, et ne se reposait de cette fatigue qu’en retrouvant une nouvelle solitude dans les rues désertes de la ville.

Je songeais à ce promeneur bizarre le 9 mai dernier, me trouvant seul dans le wagon de Mons à Bruxelles, tandis que les trains de plaisir, encombrés de voyageurs belges, se dirigeaient à toute vapeur sur Paris. Il me fallut fendre encore une foule très pressée pour sortir de l’embarcadère du midi, et gagner la place de l’hôtel-de-ville, — afin d’y boire dans la Maison des Brasseurs une première chope authentique de faro, accompagnée d’un de ces pistolets pacifiques qui s’ouvrent en deux tartines garnies de beurre. — C’est toujours la plus belle place du monde que cette place où ont roulé les deux têtes des comtes de Horn et d’Egmont, d’autant plus belle aujourd’hui qu’elle a conservé ses pignons ouvragés, découpés, festonnés d’astragales, ses bas-reliefs, ses bossages vermiculés, — tandis que la plupart des maisons de la ville, graciées et nettoyées de cette lèpre d’architecture qui n’est plus