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diminuer tout à coup et que les cabarets vont perdre leur clientelle avinée. Dans l’ensemble des dépenses générales, le budget du ministère des affaires étrangères se trouve accru d’une somme de 1,200,000 fr. : c’est le résultat d’une augmentation considérable dans le nombre des agens extérieurs : La révolution de février avait supprimé un assez grand nombre de consulats ; ils sont aujourd’hui à peu près tous rétablis, il en est même de nouvelle création. C’est ainsi que d’un côté Naples et Saint-Pétersbourg redeviennent comme autrefois des postes consulaires, et que d’un autre côté de nouveaux agens sont envoyés, notamment dans l’Amérique du Sud, à Tampico, à Guayaquil, à Cobija, à Valparaiso, où jusqu’ici il n’y avait point eu de consuls français. Chaque jour, le commerce de la France s’étend dans ces contrées, et il se trouve souvent sans protection. Ce qui nous semble surtout digne de l’attention du gouvernement, ce sort les communications de notre pays avec l’Amérique, qui jusqu’ici existent à peine. On se souvient peut-être qu’il y a quelques années les chambres avaient voté des fonds pour la création de paquebots transatlantiques. Des traités de poste avaient été négociés et signés avec divers états américains, tels que la Nouvelle-Grenade, le Venezuela. Ces belles dispositions sont restées sans effet, et il en résulte aujourd’hui que l’Angleterre s’est arrogé le monopole des communications de l’Europe avec l’Amérique, — communications onéreuses à tous les points de vue, et dont nos voisins d’outre-Manche n’accordent même pas toujours la faveur. Et ce n’est pas seulement avec cette partie du monde qu’il existe pour la France des difficultés de communications. En Europe même, les relations sont lentes et coûteuses, et des conventions postales mûrement préparées exerceraient la plus heureuse influence sur notre expansion extérieure. Ces conventions viendraient aussi en aide à des intérêts légitimes dont le gouvernement se préoccupe de plus en plus, puisque, pour les sauvegarder au dehors, il vient de décréter l’abolition de toute espèce de contrefaçon étrangère sur notre territoire. C’était le meilleur moyen de répondre à l’accusation qu’on faisait à notre pays de protéger chez lui la contrefaçon, qu’il poursuivait ailleurs. Par le seul fait de ce décret, la propriété littéraire française va se trouver garantie en Prusse et en Bavière, où il existe des lois qui protégent la propriété intellectuelle de tout pays qui garantit la leur. C’est de plus une obligation impérieuse pour le gouvernement de mettre un terme, chez nos voisins, à une industrie honteuse et misérable. Le gouvernement belge doit savoir maintenant que la France ne transigera point sur l’abolition de la contrefaçon de nos œuvres littéraires.

Une autre mesure dont nous parlions et d’une nature plus politique que le budget, d’un caractère plus intérieur que les questions qui peuvent s’élever au sujet du ministère des affaires étrangères, c’est la décentralisation. Il y a long-temps que bien des esprits se préoccupent de cette pensée, qui s’est toujours présentée sous un double aspect. Les uns y ont vu une extension des attributions et des facultés conférées aux départemens et aux communes ; ils ont résolu le problème de la décentralisation par l’affranchissement, dans de certaines limites, des pouvoirs locaux. Frappés des abus d’une centralisation poussée à ses plus extrêmes limites, ils ramenaient au siége de la communauté départementale ou municipale la solution d’une multitude d’affaires qui s’allaient perdre dans les dédales de la hiérarchie bureaucratique ; mais, dans leur pensée,