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sur une pluie de pierres tombées du ciel. Aussi suggère-t-il d’importantes considérations. Le météore marchait du nord nord-est au sud sud-est : ceci se conclut de la situation des fragmens. En effet, M. Biot ayant eu l’idée très heureuse de déterminer le contour du terrain sur lequel les pierres étaient tombées, on reconnaît que ce contour est elliptique ; par conséquent le météore suivait une direction oblique à l’horizon, car, s’il eût suivi une direction verticale, la pluie de pierres aurait couvert un espace circulaire. Après l’explosion du météore, les projectiles, dans le sens de leur mouvement général, ont dû faire d’autant plus de chemin qu’ils étaient plus gros et par suite moins ralentis par la résistance de l’air ; de la sorte, la disposition des fragmens sur le terrain selon leur ordre de grosseur donne la direction que suivait le météore. Le nuage noir était formé de la matière la plus ténue, comme celle qui compose les traînées des bolides et des étoiles filantes, traînées qui s’agglomèrent parfois en un nuage plus ou moins arrondi, lequel reste en place plusieurs secondes et même plusieurs minutes, s’il n’est entraîné par les agitations de l’air, et pendant ce temps les fragmens volumineux continuent à se mouvoir dans le sens du météore avant l’explosion, chacun de ces fragmens faisant le même bruit durant sa marche à travers l’atmosphère que dans le cas très fréquent où il ne tombe qu’une seule masse sans aucune rupture.

L’hypothèse de la formation des pierres météoriques au sein de l’atmosphère étant définitivement écartée par le rapport de M. Biot, on examina la question de savoir d’où elles venaient. D’abord Chladni, aux yeux de qui les aérolithes, les bolides et les étoiles filantes constituaient un phénomène de nature analogue, émit le premier l’hypothèse qu’ils étaient des corps dispersés dans l’espace où se meuvent les planètes, à la surface desquelles ils tombent de temps en temps, attirés par celles-ci et pénétrant dans leur atmosphère ; mais une telle idée ne fut pas accueillie, et, au lieu de recourir à des corps errans dans les espaces planétaires, Laplace, avec son école, se contenta de remonter jusqu’à la lune, amoindrissant ainsi, autant qu’elle pouvait être amoindrie, l’idée du physicien allemand. C’est seulement vingt ans plus tard que les astronomes placèrent enfin les météores ignés sans exception au rang des masses planétaires. « Si maintenant, dit M. Saigey à ce propos, on se rappelle que la discussion sur le mouvement de la terre a duré, plus d’un siècle, que la question de l’aplatissement du globe et de la fluidité primitive des planètes a duré près de cent ans, qu’enfin il a fallu près du même laps de temps pour faire admettre en France la loi de la gravitation, il sera bien établi que toutes les grandes vérités de l’ordre physique exigent, pour être généralement admises, deux ou trois générations d’hommes. »

L’opinion de Laplace fit grande sensation en Europe. On calcula