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Panama. On sait d’ailleurs que, dans les premiers mois de l’année 1850, des traités ont été conclus entre l’état de Nicaragua d’une part, et de l’autre les États-Unis, l’Angleterre et la France, pour garantir la neutralité du passage à travers le pays de Nicaragua[1]. Cette circonstance donne plus de stabilité et de forcé aux droits des concessionnaires.

Dès le mois de mai 1850, c’est-à-dire immédiatement après l’adoption définitive de son traité avec l’état, la compagnie a envoyé dans le pays un corps d’ingénieurs chargés de reconnaître les diverses directions entre lesquelles il y aurait lieu de choisir pour le tracé du canal, et d’arrêter ensuite d’une manière définitive des devis basés sur des études approfondies. Ces études sont fort avancées maintenant, et les ingénieurs sont occupés à dresser les projets et les devis, qui seront ensuite publiés et soumis à l’examen des capitalistes. Au commencement de cette année, on ne connaissait pas encore le résultat de ces travaux, mais il parait certain qu’on a effectivement trouvé, entre le lac de Nicaragua et l’Océan Pacifique, une route où les difficultés seraient beaucoup moins grandes que celles indiquées par M. Bailey. Le canal aboutirait, sur le Pacifique, à un point situé un peu au nord de San-Juan del Sur. Ce dernier port a été jugé trop peu étendu pour servir de débouché au canal.

Ce serait donc bien une voie navigable que l’on établirait sur toute la distance qui sépare les deux océans dans le pays de Nicaragua, et non pas un chemin de fer ou une route, comme on l’a stipulé éventuellement dans l’acte de concession. On doit s’attendre que les dépenses seront très considérables, bien que le chiffre n’en soit pas connu. L’existence politique du pays de Nicaragua est si incertaine encore, que, malgré les traités qui garantissent la neutralité du passage, on aura sans doute quelque peine à inspirer assez de confiance aux capitalistes pour qu’ils risquent des sommes considérables dans des travaux de cette nature. Cependant on assure que les concessionnaires ont reçu, de capitalistes anglais, la promesse conditionnelle d’une souscription pour la moitié des dépenses, si le résultat de l’examen des devis définitifs leur paraît satisfaisant. C’est un point sur lequel on sera prochainement éclairé sans doute. En attendant, les concessionnaires ont émis un certain nombre d’actions dans l’état de New-York pour subvenir aux premiers frais de l’entreprise.

Quoique les travaux d’exécution proprement dits n’aient pas encore été commencés, la concession a produit déjà un résultat positif. On a organisé un service de transport pour les voyageurs et les marchandises

  1. M. Niles, ancien chargé d’affaires des États-Unis à Turin, avait, dans une lettre adressée à son gouvernement en 1849, et communiquée récemment au sénat de l’Union par le président Fillmore, indiqué les dispositions qui lui paraissaient le plus propres à garantir la neutralité du passage et à mener les travaux à bonne fin.