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la flotte ; dans ce nombre, 40 corvettes, dont 20 à batterie couverte, et 50 bricks. Vu le développement que prendra de plus en plus la flotte à vapeur, ce chiffre de 90 bâtimens légers nous paraît exagéré et trop fort d’un tiers au moins. La réduction nous paraîtrait devoir porter sur les corvettes à batterie barbette[1] et sur les bricks de deuxième classe. Quant aux corvettes à batterie couverte, dites corvettes à gaillards, ce sont de véritables petites frégates d’un emploi utile et économique en temps de paix, et qui, en temps de guerre, pourraient fructueusement accompagner les frégates dans leurs croisières de course, sans compromettre l’honneur du pavillon, comme les corvettes à batterie barbette ; ces dernières en effet, malgré leur nom pompeux, ne sont guère plus fortes en artillerie qu’un brick de première classe. Naturellement, la guerre survenant, toute cette poussière navale serait désarmée pour faire place à des armemens de vaisseaux, frégates et vapeurs.

Les bâtimens mixtes forment une classe toute nouvelle de navires de guerre dans lesquels un appareil à vapeur auxiliaire vient donner au vaisseau ou à la frégate à voiles une puissance précieuse pour les circonstances de calme ou d’avarie de mâture dans un combat. Cet appareil à vapeur n’étant qu’auxiliaire, il nous semble qu’avant tout sa puissance et l’encombrement qu’il entraîne ne doivent enlever au vaisseau ou à la frégate à voiles ni leurs lignes d’eau, ni leurs qualités nautiques, ni une quantité trop grande des vivres, de l’eau, des rechanges et des munitions de guerre nécessaires à la navigation et au combat dans des parages lointains. Aussi appelons-nous de tous nos vœux des essais sur des bâtimens de guerre mixtes à petite vitesse ; pourvu que la machine qui leur imprime cette vitesse puisse, sans le concours des voiles, faire filer de trois à quatre nœuds en calme et malgré la houle, c’est un résultat satisfaisant pour un vaisseau qui a été démâté dans un combat, ou qui va s’embosser devant une batterie pour la démanteler. Le vaisseau à trois ponts le Montebello, qui va recevoir à Toulon un appareil de 150 à 200 chevaux, sera un bâtiment mixte de ce genre. Plusieurs personnes préfèrent, au contraire, le système adopté à bord du Charlemagne et de la Pomone, à cause du sillage de sept ou huit nœuds qu’ont obtenu ces deux bâtimens avec la vapeur seulement. Sans doute la vitesse de ces bâtimens est fort belle, mais on n’y est arrivé qu’en sacrifiant une partie de leurs qualités nautiques à la voile et en réduisant beaucoup trop leur approvisionnement de vivres et d’eau, ainsi que leur armement de guerre. Or, pour une navigation un peu lointaine, les inconvéniens ne surpasseraient-ils pas les avantages ?

Les Anglais, qui, soit dit en passant, ne cessent de multiplier les

  1. Corvettes qui n’ont de canons que sur le pont supérieur.