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du pays, qui n’étaient qu’un concubinage plus ou moins déguisé. Quant à la race noire, elle n’a pu encore malheureusement secouer l’influence de ses coutumes et de ses superstitions traditionnelles. À la voir exécuter chaque soir, dans les rues mêmes de Saint-Louis, ses danses nationales, on sent qu’au Sénégal elle se regarde comme chez elle. Presque tous les nègres pratiquent l’islamisme. C’est à l’autorité locale qu’il appartient de continuer parmi eux l’œuvre de moralisation si heureusement commencée parmi les mulâtres.

C’est encore l’intérêt commercial que nous retrouvons en première ligne dans nos établissemens de l’Inde. On sait qu’avant la guerre de 1758, ces établissemens comprenaient une étendue de pays considérable, dont les revenus n’étaient pas inférieurs à 18 millions ; maintenant ils sont réduits à quelques comptoirs. Bien que précaires, ils apportent cependant un certain contingent de navigation dans le chiffre de nos armemens maritimes, et les tissus qu’ils produisent, ceux connus sous le nom de guinées principalement, sont même de première nécessité dans nos échanges avec les peuplades africaines.

L’esclavage n’y existait pas même avant 1848. Les divisions fondamentales des castes indiennes n’ont pas cessé d’ailleurs de séparer les 160,000 Indo-Français de nos divers établissemens. L’on retrouve toujours parmi eux la caste sacerdotale ou celle des brahmanes, la caste militaire et royale ou celle des kchatryas, la caste commerçante et agricole ou celle des vaysias, et la caste domestique ou celle des soûdras, indépendamment des parias et des Maures ou musulmans, qui ne sont d’aucune caste. L’islamisme, comme le christianisme, ne compte du reste qu’un petit nombre de sectateurs parmi les Indiens ; l’immense majorité est adonnée aux cultes idolâtres.

Pondichéry, le chef-lieu de nos établissemens, est une assez jolie ville, divisée en deux parties par un canal : la ville blanche et la ville noire. La première est habitée par les Européens, au nombre de 7 à 800 ; la ville noire renferme environ 3,000 cases, qu’habitent à peu près 20,000 indigènes. Pondichéry ne possède malheureusement ni port ni rade, car on ne peut donner le nom de rade à un mouillage en pleine côte, où la mer brise sans cesse et rend les communications généralement difficiles. Le nom de cette ville rappelle une foule de souvenirs glorieux pour la France. À l’époque où notre commerce y était dans sa splendeur, Dupleix força les Anglais à en lever le siège, bien que ses forces fussent bien inférieures à celles de l’ennemi. Non loin de Pondichéry est situé Madras, dont La Bourdonnais s’empara avec une escadre composée d’un seul vaisseau et de cinq transports ; Madras où, quarante ans plus tard, Suffren attaqua l’escadre de l’amiral Hugues, dont il désempara l’arrière-garde. Un peu plus au sud que Pondichéry, c’est l’île Ceylan, c’est Trinquemalé, dont le même amiral Suffren