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la dernière génération de l’école napolitaine s’attachent presque exclusivement au genre de l’opéra buffa, qu’ils poussent jusqu’à sa perfection.

On le voit, l’école napolitaine, fondée par Alexandre Scarlatti au commencement du XVIIIe siècle et qui finit à Cimarosa, mort prématurément en 1801, occupe une place importante dans l’histoire de la musique italienne. Dans l’espace d’un siècle, elle épuise à peu près toutes les formes mélodiques qui peuvent servir à l’expression des sentimens aimables qui flottent à la surface de l’ame sans trop l’agiter. Jomelli et Traetta ont essayé de fouiller plus avant dans les profondeurs du cœur humain, de peindre les caractères et les situations compliqués par une instrumentation plus vigoureuse et des modulations moins prévues. Cependant leur exemple n’a pas produit tous les résultats qu’on devait en espérer, et c’est à Gluck qu’appartient la gloire d’avoir continué la réforme du drame lyrique, qui avait été commencée par Jomelli. On pourrait comparer le rôle de l’école napolitaine à celui que joue l’école romaine dans l’histoire de la peinture en Italie ; on trouverait plus que de l’analogie entre la supériorité reconnue de celle-ci dans le dessin et l’incontestable prééminence de celle-là dans la mélodie douce et touchante. Sur ce dessin pur et charmant de l’école napolitaine, Rossini viendra jeter les brillantes couleurs de son magnifique génie.

Dans le groupe de compositeurs illustres qui forment la dernière génération de l’école napolitaine, Paisiello se fait remarquer par une physionomie particulière. Doué d’une imagination douce, il trouve des mélodies heureuses qui jaillissent sans efforts de son cœur ému. S’il n’a pas la fraîcheur, la suprême élégance et le brio de Cimarosa, il possède un accent de tendresse si vraie et si profonde, qu’il a mérité le surnom de musicien de l’amour. Ce n’est pas à dire que l’auteur du Barbier de Séville, du Roi Théodore et de la Molinara manque d’entrain et de gaieté ; mais le rire de Paisiello n’a pas la soudaineté, la souplesse et le pétillement de celui de Cimarosa et de Guglielmi, et, dans les scènes les plus comiques, sa gaieté ressemble à un rayon de soleil dont un léger nuage contrarie l’essor et tempère l’éclat. Comme presque tous les compositeurs napolitains, excepté Durante et Jomelli, Paisiello avait plus de pratique, de dextérité de main que de véritable science. Son harmonie est correcte, mais extrêmement simple. Il module peu, et, lorsque cela lui arrive, il ne s’éloigne guère du point de départ ; il va de la tonique à la dominante, et puis subito a casa, comme dit plaisamment Ferrari. Son instrumentation, suffisante pour le temps, est presque aussi simple que l’harmonie, qui lui sert d’aliment. On ne trouve pas dans l’orchestre de Paisiello la variété de rhythmes et les épisodes piquans qu’on remarque