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De filles du désert au superbe maintien
Et des palais dorés du conteur indien.

O divine folie! adorable jeunesse!
Tu nous versais alors ton immortelle ivresse,
Et ta chanson joyeuse, après dix ans passés,
Trouve encore un écho dans nos cœurs apaisés !
La goutte d’eau limpide, après un jour de fièvre,
Comme un présent du ciel tombe encor sur ma lèvre!
Les yeux remplis de sable et les membres perclus,
Les fatigues, la faim, je ne m’en souviens plus!
Je n’entends que le bruit de tes mille fontaines,
O Damas souriante au bout des longues plaines!
Je m’abrite à vos murs, couvens hospitaliers
Dont la porte s’ouvrait aux poudreux cavaliers!
— O mon cher compagnon, si de longues années
Blanchissent sur nos fronts de neige couronnées,
Au clair pétillement d’un fagot de genêts
Quand nous réchaufferons nos pieds sur les chenets.
Bien abrités du vent qui gronde à la fenêtre,
Vieillards glacés par l’âge et friands de bien-être,
Blottis dans nos fauteuils, et, faute d’avenir.
Nous retournant tous deux vers un doux souvenir,
En dépit de la goutte et de la sciatique.
Nous toucherons encor le sol asiatique,
Et nous te reverrons du coin de notre feu,
soleil qui souris dans un ciel toujours bleu,



AU SULTAN ABDUL-MEDJID.


I.


Abdul-Medjid! ô sultan redouté,
A Beylerbey, dans ton palais d’été,
D’un œil de maître tu regardes
Constantinople ouvrant sa Corne d’or.
Ces trois cités qui dorment près du port
Sous les tours où veillent tes gardes !

Ils sont à toi, tous ces rians jardins
Se déployant sur de vastes gradins,
Et ces maisons aux couleurs vives.