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il s’était engagé avec elle par une promesse de mariage authentique et signée[1], et lorsque Anne de Gonzague, comptant sur sa parole, fait la folie de s’enfuir pour aller le rejoindre à Bruxelles, se faisant déjà appeler Mme de Guise, elle le trouve marié à la comtesse de Bossu, dont il se lasse bientôt, et qu’il quitte à son tour pour revenir à Paris, quand Richelieu et Louis XIII ne sont plus. Là, il fait une cour bien facile à Mme de Montbazon. Un peu après, il devient éperdument amoureux de Mlle de Pons, une des filles d’honneur de la reine Anne, fort jolie et fort coquette; il veut l’épouser; il s’en va solliciter à Rome la rupture de son premier mariage, et par occasion, pour conquérir une couronne à sa nouvelle maîtresse, il court se mettre à la tête de l’insurrection de Naples. Il arrive à travers mille hasards, fait faute sur faute, déploie la valeur la plus brillante, sans aucun talent ni politique ni militaire, est fait prisonnier par les Espagnols, supplie Condé, malheureusement alors tout-puissant en Espagne, d’obtenir sa délivrance, lui promettant un dévouement à toute épreuve; et, après qu’il a retrouvé sa liberté, grâce à l’intervention de Condé, au lieu de le servir comme il s’y est engagé par une déclaration publique, il l’abandonne, passe à Mazarin, prend part à tout ce qui se fait contre son libérateur, intente à cette même Mlle de Pons, dont il voulait faire une reine de Naples, un procès honteux, pour ravoir les meubles et les pierreries qu’il lui avait donnés, devient grand chambellan, et n’est bon qu’à parader dans les fêtes et les tournois de la cour, et à faire dire, quand on le voit passer avec Condé : voilà le héros de la fable à côté du héros de l’histoire; emportant avec lui au tombeau, en 1664, cette illustre maison de Guise, qui méritait de finir autrement. En 1643, à son arrivée à Paris, il était tombé dans le parti des importans, et il était merveilleusement fait pour être un des chefs de ce parti, car il était vain, brillant et incapable.

Les femmes occupaient une grande place dans cette Fronde anticipée du commencement de la régence.

La reine Anne avait eu autrefois pour confidentes et pour amies la célèbre duchesse de Chevreuse et Mlle d’Hautefort, devenue depuis la maréchale duchesse de Schomberg. Ces deux dames n’avaient de commun qu’une grande beauté et une disgrâce courageusement supportée. Marie d’Hautefort était, avec Mme de Sablé, un des modèles de la vraie précieuse, aussi belle, aussi spirituelle, et qui avait égalé sa conduite à ses maximes. Fille d’honneur de la reine, Louis XIII avait eu pour elle cet amour platonique, alors à la mode, dont il aima aussi Mlle de Lafayette. Richelieu, après avoir essayé inutilement de la gagner,

  1. Nous avons trouvé, dans les manuscrits de Conrart, t. V, in-fol., p. 605, les pièces les plus authentiques à ce sujet.