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que les électeurs, selon toute apparence, vont faire rentrer de nouveau dans la vie parlementaire, après l’en avoir momentanément écarté. Sa nomination sera pour l’Ecosse un grand honneur, et pour le parti whig une grande force.

La Suisse est aussi dans le plein mouvement de la vie politique. La session de l’assemblée fédérale vient de s’ouvrir à Berne. Les travaux commencent à peine; déjà cependant le conseil national a tranché une assez grave question d’intérêt matériel dans un sens contraire aux propositions des radicaux : il a voté l’exécution des chemins de fer par des compagnies particulières. L’assemblée fédérale verra très probablement se produire dans son sein, d’ici à peu, les questions politiques engagées dans ces derniers temps sur divers points de la confédération. Il est assurément fort désirable qu’un esprit conciliant et modéré préside à ces discussions et aux résolutions qui pourront être prises. En réalité, la lutte ouverte depuis quelques mois entre les opinions conservatrices et le radicalisme se poursuit avec ses alternatives ordinaires; mais presque partout le parti révolutionnaire se sent menacé et frappé par la masse des populations elles-mêmes. Voyez ce qui vient d’avoir lieu dans le Valais, où les radicaux dominaient depuis 1847. La révision de la constitution a été votée presque unanimement par le peuple. La question de l’élection d’une assemblée constituante a été résolue de la même manière. Cette assemblée sera élue prochainement, et il n’est point douteux que la constitution qu’elle élaborera ne soit dans un sens complètement conservateur. Là, au reste, les radicaux maîtres du pouvoir n’ont point décliné le vote populaire. Il n’en est pas tout-à-fait de même à Fribourg, où le radicalisme, sous le poids de manifestations analogues, n’en poursuit pas moins son œuvre et dispute matériellement le pouvoir qui lui est moralement échappé. On se souvient de la réunion populaire qui eut lieu il y a quelque temps à Posieux et du comité créé à la suite de cette réunion pour provoquer l’abdication des radicaux. Le grand conseil de Fribourg, mis en demeure de se soumettre au vote des citoyens, non-seulement s’est refusé à toute concession, mais il a prétendu dissoudre le comité de Posieux, et a redoublé de violences et de persécutions. Qu’en est-il résulté? L’agitation a gagné le canton. Les rixes se multiplient. Les citoyens qui se trouvaient à l’assemblée de Posieux sont désignés aux haines révolutionnaires qui vont tout simplement jusqu’à l’assassinat. L’anarchie se montre partout. Une nouvelle pétition à l’assemblée fédérale se signe aujourd’hui dans le canton de Fribourg. Elle réunira, selon toute apparence, une quasi-unanimité; mais qu’est-ce que cela pour la démagogie dictatoriale de ces malheureux pays? Le radicalisme suisse, du reste, vient d’ajouter à son histoire une de ces petites infamies qui sont ses bonnes fortunes et ses triomphes. Un des plus invincibles penchans de l’esprit révolutionnaire, on le sait, c’est la haine des supériorités, le besoin de les rabaisser, s’il peut, à son niveau. Il a trouvé plaisant récemment d’assimiler M. Thiers à un réfugié ordinaire en prétendant appliquer à l’éminent historien les lois sur l’internement. C’est M. Druey, le chef de la police fédérale, qui a représenté le radicalisme suisse dans cette belle œuvre. M. Druey est un des glorieux personnages de la démagogie helvétique. Il buvait en 1848 à la trinité humanitaire. Il donne la main au socialisme, il est le ministre de ses haines. Ajoutons que M. Druey s’est vu désavoué par tous les esprits élevés de la Suisse, et qu’il en a été pour sa tentative brutale.