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à Burgos, qui doit être prolongée jusqu’à la frontière française, et la ligne de Madrid à Almansa, qui doit aller aboutir à la Méditerranée. M. Salamanca est l’adjudicataire de ces deux chemins. Ce n’est point même parmi les capitalistes et les industriels de profession seulement que règne cette ardeur. Sur tous les points de la Péninsule, les moindres localités s’enflamment d’un beau zèle et s’imposent pour avoir un tronçon de chemin de fer. Nous avons vu autrefois en France une fièvre semblable : elle est plus singulière en Espagne, où on est moins prompt à l’enthousiasme pour des travaux de ce genre. Aussi est-ce un symptôme d’autant plus remarquable. Il n’y a qu’une chose à désirer, c’est que ce mouvement ne soit point entravé par des révolutions nouvelles, ou qu’il n’aboutisse point trop promptement à des déceptions qui replongeraient peut-être le pays dans son ancienne torpeur. L’essentiel pour l’Espagne, c’est de suivre dans toutes ces entreprises une marche régulière, successive, de se ranimer peu à peu par le travail et de finir par retrouver une vie nouvelle dans le développement intelligent et bien dirigé de tous les élémens de prospérité intérieure qu’elle contient. Ce développement de l’industrie, du commerce, de l’agriculture, de la richesse publique en un mot, est la meilleure garantie des règlemens financière opérés depuis un an par M. Bravo Murillo.

Si on jette un moment les yeux sur l’Italie, on ne peut s’attendre à y trouver une vie politique bien active, on le conçoit. Sauf le Piémont, où le régime constitutionnel est resté debout, les autres pays sont retombés dans l’état où ils étaient avant 1848. Il y a quelques mois déjà, en Toscane, le dernier vestige de la révolution, le statut, disparaissait définitivement comme loi de l’état, et on peut se souvenir qu’à la suppression de la constitution toscane se rattachait une crise ministérielle qui était sur le point de mettre hors du pouvoir le président du conseil, SI. Baldasseroni. Une crise semblable vient de se reproduire encore. Comme la précédente, elle est née d’une rivalité d’influence entre M. Baldasseroni et le ministre de l’instruction publique, M. Boccella, représentant d’une réaction plus décidée. Seulement cette fois M. Boccella a dû quitter le ministère et a été remplacé par M. Buonarotti. Le ministre d’Angleterre, par ses représentations au grand-duc, ne parait point étranger à cette solution. On ne saurait cependant affirmer que les hésitations du grand-duc ne renaîtront pas et ne ramèneront pas au pouvoir M. Boccella. Il y a un fait plus considérable et qui s’étend à toute l’Italie, c’est l’effort incessant que fait l’Autriche pour retrouver dans ce pays son ancienne situation. Elle poursuit son œuvre en établissant une union douanière avec les petits états, et tout récemment encore elle vient de signer un traité avec l’état de l’église, la Toscane, les duchés de Modène et de Parme, pour la construction d’une ligne de fer désignée sous le nom de chemin de fer central de l’Italie. L’Autriche demande ainsi aux améliorations matérielles raffermissement de sa puissance. C’est sans doute le meilleur moyen de se prémunir contre de nouveaux dangers qui pourraient naître pour elle en Italie. En voyant l’ascendant de l’Autriche se fortifier et s’étendre ainsi au-delà des Alpes, on peut se demander à quoi servent les débordemens révolutionnaires ? Ils ont servi pour les états italiens à les ramener au point d’où ils étaient partis, après avoir traversé des catastrophes inouïes.