Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 2.djvu/1210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

distance, et personne n’était là pour l’indiquer, personne ne nous avait prévenus de rien. Avant d’arriver à Richmond, nous sommes descendus du chemin de fer de même la nuit et par la pluie, sans être avertis de ce qu’il y avait à faire, et obligés de chercher à tâtons un omnibus dont on ne nous avait point parlé, et qui seul pouvait nous conduire à Richmond. Si nous ne l’avions pas découvert, s’il eût été rempli avant notre arrivée, il aurait fallu franchir à pied une distance d’une demi-lieue en portant nos malles et sans perdre de temps pour arriver avant le départ du chemin de fer de Richmond. Vraiment cela est intolérable, et je le répéterai jusqu’à ce que j’aie fait honte aux Américains de cette absence d’indications tout à fait indigne d’un peuple civilisé.


6 janvier.

Ce matin, nous cheminons très lentement sur une portion de chemin de fer dont les remblais ne sont pas solides ; puis les rails traversent une rivière sur un pont à jour. Ni planches au-dessous des wagons, ni parapet de côté ; nous sommes comme suspendus au-dessus de l’eau que nous voyons courir sous nos pieds : ce spectacle est peu rassurant. On suit le chemin de fer jusqu’à Wilmington, où l’on trouve un petit bateau à vapeur qui, en vingt-quatre heures environ, vous porte à Charleston, capitale de la Caroline du sud. Ainsi on passe brusquement et sans transition d’un pays qui n’a encore rien de méridional dans une région où le midi commence décidément à se faire sentir.

En quittant Wilmington, on navigue assez longtemps dans des espèces de lagunes bordées par des côtes plates dont l’aspect rappelle un peu les rivages de la Hollande. La mer est tantôt noirâtre, tantôt couleur de bistre, comme dans certaines marines hollandaises. Nous nous arrêtons devant quelques maisons qui s’élèvent auprès d’un groupe de pins. Cette station dans ce triste lieu me rappelle une station pareille dans la Mer du Nord, en vue des côtes de la Frise. Le soir, beau coucher de subtil, bande orangée, à l’ouest ; puis la nuit vient, la lune se lève, et répand sa blanche et sereine clarté sur l’azur agité des vagues.


7 janvier.

Ce matin, le lever de soleil commence bien : ensuite nous avons de la peine à sortir des brumes et du nord. Enfin le soleil est radieux et le ciel parfaitement pur pour notre arrivée à Charleston.

Charleston s’élève entre deux rivières, comme New-York, mais la ville s’étend en largeur au lieu de se terminer angulairement. En avant sont des navires. Ce n’est pas le mouvement de New-York, nous ne sommes plus au nord ; nous ne trouverons plus, je pense, cette