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inventions, à construire ces puissantes machines, pour les jeter dans le monde industriel et commercial. Voyez cependant : à côté de nous, ce que nous ne faisons pas, un petit peuple le tente hardiment et résolument dans la mesure de ce qu’il peut Le Piémont va avoir ses paquebots transatlantiques. Une loi, en ce moment soumise aux chambres, traite de la concession d’un privilège à une compagnie qui s’engage à organiser deux services mensuels, — l’un de Gènes à New-York, en touchant à Marseille. Barcelone, Malaga, Gibraltar et Madère, l’autre de Gênes à Montevideo et desservant entra les mêmes points, la cote du Brésil. Le voyage de New-York s’accomplira en vingt-deux jours, celui de Montevideo en trente-huit jours. Le Piémont paie ces avantages d’une subvention annuelle de 624,000 livres. Ce n’est point trop payer pour faire de Gênes une des têtes de ligne des rapports de l’Europe avec le Nouveau-Monde.

Ce que font ces systèmes de communication plus rapide et plus régulière pour les relations transocéaniques, les chemins de fer le font sur le continent. Ils effacent les distances, rapprochent et multiplient les intérêts, transforment les contrées où ils passent. Parmi tous ces travaux, où s’absorbe l’activité contemporaine, il en est, pourrait-on dire, d’un intérêt européen : tel est aujourd’hui le chemin de fer du nord de l’Espagne, dont la pensée, déjà ancienne, est sur le point d’être réalisée. Il en est aussi d’un intérêt plus particulièrement national : tel est le chemin qui vient de prendre dans le monde de l’industrie le nom de grand-central. Le chemin de fer du nord de l’Espagne, c’est-à-dire d’Irun à Madrid, parait être passé maintenant aux mains d’une compagnie puissante, qui a réuni les capitaux espagnols, anglais et français, pour mener à une prompte fin une entreprise sous laquelle l’Espagne seule eût plié sans doute. Il suffit de jeter un regard sur la Péninsule pour voir de quel avantage peut être ce chemin pour les contrées qu’il est appelé à traverser. Ce qui manque aux provinces centrales de l’Espagne, ce n’est point la fertilité, ce sont les moyens d’en faire sortir aisément les fruits de la terre, si bien que souvent l’abondance des récoltes n’est nullement une richesse. À ce point de vue, le chemin de fer d’Irun à Madrid peut contribuer singulièrement an développement intérieur de l’Espagne ; mais il est un côté, comme nous le disions, par où il a un caractère en quelque sorte européen. En quelques années et au moyen des lignes qui se continuent de Madrid vers le midi de l’Espagne, on pourra aller ainsi sans interruption de Saint-Pétersbourg à Cadix. Toutes les plus grandes capitales de l’Europe, les principaux centres d’action politique, comme les foyers d’activité industrielle, se trouveront en communication directe, en contact permanent pour ainsi parlée Quant au chemin central de la France, il a un mérite essentiel, c’est de porter la vie et le mouvement dans des régions demeurées jusqu’ici en dehors des systèmes de communication appliqués au reste du pays. Il desservira notamment les bassins houillers de l’Aveyron, les forges et les hauts-fournaux du Limousin et de la Dordogne. Les grands traits de la combinaison nouvelle consistent à relier Bordeaux à Lyon par les provinces centrales, et à créer deux lignes, l’une de Germont à Montaubau, l’autre de Limoges à Agen, comme base ou point de raccord des ligues qui s’étendront plus tard vers les Pyrénées. Ce vaste réseau, décrété en principe, ne comprend pas