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1852, au-delà de trois cents stations pourvues de télégraphes électriques, et l’une après l’autre toutes les administrations de chemins de fer ont senti la nécessité d’adopter cet utile auxiliaire. Aux principales stations commerciales des employés sont en fonctions nuit et jour. On compte au moins cent stations pareilles, et dans les autres moins importantes, les dépêches ne se transmettent que de jour. La longueur des routes occupées télégraphiquement était, au mois d’août dernier, de 5 à 6,000 kilomètres ; mais depuis cette époque, cette distance s’est considérablement accrue. En la portant à 8,000 kilomètres, on serait sans doute encore au-dessous de la réalité. Le lecteur voudra bien se rappeler que le kilomètre français est tout juste la quarante-millième partie du contour de la terre, en sorte que les fils anglais font aujourd’hui en longueur la cinquième partie du contour de notre planète. Une seule compagnie a employé 4,000 kilomètres de fil de fer galvanisé, et elle a cédé à d’autres entreprises une partie de ses droits, moyennant arrangement pécuniaire.

Dans le télégraphe anglais, les fils sont ordinairement d’un sixième de pouce de diamètre (un peu plus de 4 millimètres). Nos fils français ont à peu près la même dimension, savoir 4 millimètres. On a couvert tous les fils d’une mince couche de zinc par un procédé galvanique, pour les préserver de l’oxydation. Six kilomètres et demi d’un pareil fil, anglais ou français, pèsent à peu près une tonne, c’est-à-dire 1,000 kilogrammes. Les poteaux qui supportent les fils, un peu plus rapprochés qu’en France, sont espacés de 60 mètres et garnis de pièces de porcelaine ou d’autres substances isolantes, pour que le fil ne touche pas immédiatement le bois du poteau, ce qui ferait perdre une partie du courant. La forme de ces pièces fait qu’elles sont abritées en dessous contre la pluie. À des intervalles de 400 mètres environ, il y a des appareils pour tendre ou relâcher les fils au degré convenable. En France, le même espace est de 500 mètres. Le grand nombre de fils que l’on aperçoit le long des principales ligues de chemins de fer n’est pas nécessaire pour la transmission d’un message. Un simple fil peut y suffire ; mais les autres servent à diverses correspondances spéciales pour les diverses stations.

Le télégraphe à aiguilles aimantées est toujours le plus généralement employé en Angleterre. C’est, sinon le plus commode, au moins le plus sensible de tous ; mais c’est aussi celui qui se laisse le plus facilement déranger par les perturbations météorologiques. Les signaux se transmettent par les seules agitations imprimées à deux aiguilles aimantées. Malgré plusieurs perfectionnemens, ce système, dit système anglais, est encore à peu près celui que MM. Cooke et Wheatstone mirent en usage, et qu’ils essayèrent même à Paris, sur le chemin de fer de Versailles. En général, la grande compagnie télégraphique anglaise a acquis les brevets de toutes les inventions et de toutes les machines patentées, de manière à les employer concurremment avec le télégraphe à aiguilles.

Il y a eu beaucoup de procès et de plaidoiries on Angleterre à l’occasion des droits établis par les brevets et patentes sur la télégraphie électrique ; mais on peut dire que toutes ces poursuites judiciaires ne sont rien en comparaison de ce qui a eu lieu aux États-Unis, où le système de la télégraphie électrique est développé sur une immense échelle. Les télégraphes le plus en usage dans cette contrée sont ceux de Morse, de Bain et de House, dont le