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et de leurs blessures, comme saint Blaise en leur imposant les mains, et ils les ressuscitent quelquefois. Ceux-ci, de leur côté, se montrent reconnaissans et rendent service pour service. De même que dans l’antiquité les piverts et les loups guidaient les colonies étrusques ou indiquaient aux fondateurs des villes remplacement qu’ils devaient choisir, de même les faucons, les aigles ou les colombes indiquent aux solitaires ou aux fondateurs des ordres religieux l’endroit que Dieu même a marqué pour leur cellule ou leur cloître. Saint Balderic, voulant se retirer dans la solitude, aperçut au-dessus de sa tête un faucon qui volait doucement et semblait l’inviter à le suivre. Il le suivit avec confiance, s’arrêta lorsqu’il le vit s’abattre, bâtît son ermitage à l’endroit même où il s’était posé, et donna à ce lieu solitaire, en mémoire de l’oiseau, un nom que les siècles ont respecté, celui de Mont faucon. Une colombe trace dans son vol circulaire le plan du monastère de Hautvillers. Enfin un cerf désigne au duc Anségise la place de l’abbaye de Fécamp en décrivant un grand cercle autour d’un arbre. Les animaux jouent un rôle analogue dans la découverte des reliques. C’est encore un cerf qui indique à Dagobert l’endroit où reposent les restes de saint Denis et qui révèle en Irlande le tombeau de saint Kellac.

Saint François d’Assise, qui appelait les poissons mes frères et les hirondelles mes sœurs, n’avait point, après la pratique des œuvres de la charité, d’occupation plus douce que de se trouver dans la compagnie des brebis, des oiseaux, des papillons, et de leur faire entendre de ferventes exhortations. « Ces créatures innocentes, disent les hagiographes, témoignaient par leurs mouvemens la joie qu’elles avaient de l’entendre, et après le sermon elles se servaient des industries que la nature leur avait données pour bénir et louer le Seigneur. » Saint Antoine de Padoue, prêchant à Rimini devant des hérétiques, s’aperçut qu’ils se bouchaient les oreilles pour ne point l’entendre. Il interrompit son discours et pria ses auditeurs de le suivre sur les bords de la mer, à l’embouchure de la rivière de Marecchia : « Poissons de la mer et des fleuves, dit-il en étendant la main sur les flots, sortez des profondeurs de l’abîme, paraissez sur la face des eaux pour écouter la parole de Dieu et confondre par votre attention la malice des impies. » Aussitôt on vit paraître, au-dessus des vagues qui venaient mourir doucement sur le rivage, une multitude innombrable de poissons qui se rangèrent en bel ordre, selon leurs espèces et leur grosseur, les petits en avant et les gros en dernière ligne. Le saint leur représenta les obligations qu’ils avaient à Dieu, dont la toute-puissance les avait tirés du néant : « Savez-vous, leur dit-il, poissons, mes frères, ce qu’il a fait pour vous en vous donnant pour demeure cette mer si tiède et si claire,