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de creuser que lorsqu’elles rencontraient un sous-sol lisse, glissant et compacte comme du savon. C’est ce sous-sol qui, aujourd’hui travaillé par l’homme, remué, brisé par la pioche et la charrue, imprégné d’air, de lumière, d’humidité et du sel des engrais, protégé par des terrassemens ou des rigoles contre les ravages des pluies, va reconstituer un sol nouveau auquel ou ne peut pas demander dès les premiers jours les fruits de l’avenir. Malheureusement, pour opérer cette transformation, on ne trouvera que des colons pauvres, des hommes de travail et de privations, auxquels il faudra toujours plus ou moins venir en aide. Bien peu d’hommes possédant un capital petit ou grand seront tentés de le sacrifier en le confiant à une terre qui ne le rendra peut-être qu’à leurs successeurs. Combien de fois les trappistes eux-mêmes, ces hommes d’une abnégation si complète et qui ne sèment point pour le temps, mais pour l’éternité, combien de fois, malgré l’appui énergique du gouvernement, ils ont été sur le point d’abandonner la partie pour retourner à leur morceau de pain et à leurs légumes de France! Honorons le courage des colons (liii ont persisté, et ne nous hâtons pas de jeter la pierre à ceux-là-même qui ont faibli. Sans parler des maladies et de la mort, il y a eu là des épreuves plus fortes que la dose de constance ordinairement donnée à la nature humaine, et parmi ceux qui se sont trouvés des plus faibles là-bas, beaucoup peut-être mériteraient encore d’être comptés parmi les plus forts d’ici.

Ce qui a aidé les colons à se soutenir, c’est le foin qui vient de lui-même en Algérie partout où la broussaille et le palmier nain lui laissent un peu de place. Quelques pluies d’hiver suffisent pour créer partout des prairies sauvages plutôt encore que naturelles, où le sainfoin, la luzerne et les autres plantes fourragères se développent avec une abondance qui tient du prodige et une admirable vigueur; mais en ceci encore le Sahel est bien inférieur à la plaine. Néanmoins le foin est pour lui comme une manne qui lui tombe du ciel. Aussi nous paraît-il inutile de compter cela comme culture et d’y consacrer un tableau. Qu’il suffise de dire qu’en 1847, l’administration

PRODUITS.


19 hectolitres, à 17 fr.60 c. l’un 334 fr. 40 c.
10 quintaux de paille longue livrés à l’administration militaire 100 »
434 fr. 40 c.
8 quintaux de paille courte restés à la ferme, à 3 fr. l’un. 24 »
Produit brut 458 fr. 40 c.
A défalquer pour frais 319 05
Produit net 139 fr. 35 c.

A Saint-Ferdinand, le produit net d’un hectare également ensemencé en blé, mais sans engrais, était encore inférieur à celui que nous tirons de l’exemple pris à Ouled-Fayet. — pour un hectare d’orge, avec un seul labour, dans ce même village de Saint-Ferdinand, le total des frais donnait 158 fr, le produit brut 202 fr, ce qui laissait pour bénéfice net 44 fr. Cet exemple était pris sur des terres tenant au village, fumées et cultivées avec, soin depuis leur défrichement, et d’une nature bonne et forte.