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ni pour la confiance qu’elles inspirent. On n’a jamais vu en Écosse de ces demandes subites de remboursement qu’on appelle courses

sur les banques, run on the bank, si fréquentes en Angleterre et surtout en Irlande, Outre l’habitude, qui a une si grande puissance sur les hommes, et qui, lorsqu’un signe est universellement admis dans les transactions journalières, eu soutient naturellement la valeur ; outre le calme distinctif de l’esprit national, qui ne se laisse pas facilement alarmer, cette sécurité merveilleuse a des causes profondes. Non-seulement, suivant la loi anglaise, tous les actionnaires d’une banque sont tenus solidairement de toutes les obligations de la banque jusqu’à la totalité de leur fortune personnelle ; mais l’émission des billets a été bornée depuis 1845 par la loi, et avant 1845 par l’usage, au tiers environ du capital, à moins d’un encaisse en numéraire toujours disponible, qui représente le surplus, et les banques, étant obligées de se rembourser réciproquement deux fois par semaine leurs billets à présentation, exercent les unes sur les autres un contrôle qui rend impossible tout excès d’émission.

Le crédit des banques ainsi établi, voici l’usage qu’elles en font, et c’est en ceci surtout qu’elles sont utiles : elles reçoivent à titre de dépôt toute somme au-dessus de 10 livres sterling ou 250 francs, et, bien que ces dépôts puissent être retirés à volonté, elles en paient l’intérêt à 2 1/2 ou 3 pour 100. Personne n’a d’argent chez soi ; chacun a son compte à la banque voisine, où l’on verse et où l’on puise successivement au fur et à mesure de ses dépenses et de ses recettes. On ne saurait croire combien cette coutume est favorable à l’esprit d’économie dans toutes les classes de la société. Les domestiques et les ouvriers ont, comme leurs maîtres, leur compte à la banque dès qu’ils ont pu réunir 10 liv. sterl. L’excédant habituel de ces comptes courans ne reste pas inactif ; les banques le prêtent à ceux qui leur présentent des garanties suffisantes à 4 ou 5 pour 100. Indépendamment des escomptes ordinaires du papier de commerce, quiconque est connu pour un homme intelligent, laborieux et honnête, et se présente accompagné de deux cautions solvables, peut obtenir l’ouverture d’un crédit proportionné à la confiance qu’il mérite, ce qu’on appelle un compte de caisse, cash account. Ces crédits à découvert ne s’élèvent pas, pour toute l’Écosse, à un chiffre énorme ; on les évalue de 5 à 6 millions sterl, ou de 100 à 150 millions de francs ; ceux qui en obtiennent font tous leurs efforts pour s’acquitter vite, et leurs cautions ont soin d’y veiller, de sorte que le personnel de ces débiteurs change sans cesse ; mais cette somme flottante de 100 à 150 millions, répartie sur tous ceux qui commencent avec un faible capital, a eu les conséquences les plus heureuses sur le développement industriel et agricole, et tel est le choix que font les banques