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conservé par les gouvernemens jusqu’au moment de la guerre. Accorder si peu et si tard, c’était tout ajourner et tout interdire.

Tandis que se discutait cet objet ostensible de la diète, les négociations secrètes pour l’empire se poursuivaient avec les électeurs. Maximilien, arrêté un instant par la défiance parcimonieuse de son petit-fils, avait emprunté à la banque des Fugger 30,000 florins d’or pour défrayer les princes venus surtout à Augsbourg dans un intérêt qui lui était particulier[1]. Enfin arrivèrent les nouvelles instructions du roi catholique, qui envoyait une assignation de 100,000 ducats de plus sur le royaume de Naples, et qui autorisait à se servir immédiatement de l’argent porté par Courteville. Maximilien se mit alors à l’œuvre vivement. Il obtint sans peine la voix du jeune roi de Bohême en distribuant 11,000 florins d’or aux ambassadeurs du roi de Pologne, qui était avec lui cotuteur de ce prince. Le suffrage de l’électeur de Cologne n’avait pas été engagé encore; il l’acquit au prix peu élevé de 20,000 florins d’or et d’une pension de 6,000. Afin de l’affermir dans ses volontés, qu’il savait n’être pas invariables, il gratifia de sommes et de pensions — proportionnées à l’influence qu’ils exerçaient sur lui — ses deux frères, les comtes Guillaume et Jean de Wied, son chancelier, ses divers conseillers, et Guillaume de Newenar, l’un des comtes les plus puissans de l’électorat.

Il semblait beaucoup moins facile de gagner l’archevêque de Mayence et le margrave de Brandebourg. Ce dernier, en partant pour la diète d’Augsbourg, avait fait assurer François Ier de la fidélité persévérante qu’il garderait envers lui, et le prince électoral son fils avait envoyé une bague montée d’un beau diamant à Mme Renée de France, qu’il considérait comme sa fiancée[2]. Il n’avait su cependant résister ni aux instances, ni aux offres de Maximilien. Défaisant un mariage par un autre, l’empereur avait promis la plus jeune de ses petites-filles, l’infante Catherine, au fils du margrave, auquel elle serait remise l’année suivante avec une dot de 70,000 florins d’or payables le jour de l’élection, outre 30,000 en don gratuit. L’archevêque de Mayence, qui reçut le chapeau de cardinal à Augsbourg, dut avoir pour sa part 52,000 florins d’or comptant, une crédence et un service d’argent à sa discrétion, et le prix d’une belle tapisserie qu’il avait commandée en Flandre. Deux pensions de 8,000 florins d’or étaient assurées aux deux frères sur les villes

  1. Estat de l’argent comptant que à cette journée impériale d’Augsbourg a, pour et au nom du roy, esté desboursé. Dans Mone, p. 407 à 411. Le florin d’or valait un peu moins que l’écu d’or au soleil. Il pesait 3gr,225, ce qui lui donnait une valeur métallique de 10 fr, 64 c, qu’il faut multiplier par 5 pour avoir sa valeur relative.
  2. Instructions latines données à Moltzan par François Ier le 23 octobre 1518. Archiv., carton J. 952, pièce 8.