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d’Anvers et de Malines, dont ils exigeaient la garantie formelle. Maximilien s’applaudissait d’avoir détaché de François Ier l’électeur de Brandebourg, tout en trouvant qu’il faisait payer cher son infidélité à la France et son retour à l’Autriche. « Le marquis, disait-il, couste beaucoup à gagner; toutefois son avarice est avantageuse au seigneur roi (mon petit-fils), car par elle il parvient à son désir[1]. » Il récompensa d’une somme de 12,000 florins d’or et d’une pension le zèle ardent que déployait pour la maison impériale le margrave Casimir de Brandebourg de la branche de Franconie.

Le comte palatin ne s’était pas rendu à la diète. Il avait envoyé un messager à François Ier pour l’assurer de ses bonnes dispositions[2], et il chassait à Dilsberg[3] pendant que Maximilien pratiquait les électeurs à Augsbourg. Son éloignement inquiéta le vieil empereur, qui en connaissait les causes trop fondées. Il se servit, pour l’amener et le séduire, de son frère le comte Frédéric, qui n’avait pas moins à se plaindre de la maison d’Autriche, dont il avait reçu naguère un affront public, mais à laquelle il portait un long et inébranlable attachement. Ce cadet de la maison palatine, élevé auprès de l’archiduc Philippe le Beau, demeuré à la cour du roi Charles, avait conçu une passion romanesque pour l’infante Éléonore, qui le payait de retour; il avait même obtenu de cette princesse, alors âgée de vingt ans, qui épousa en 1518 le roi Emmanuel le Fortuné, et en 1530 François Ier, une promesse de mariage. Le roi Charles surprit entre les mains de sa sœur une lettre d’amour du comte Frédéric, qui l’appelait sa mie[4] et lui disait : « Je suis prest de ne demander aultre chose, synon que je soye à vous et vous à moy. » L’altier descendant des empereurs et des rois, courroucé de ce langage et d’une semblable prétention de la part d’un petit prince sans territoire et sans souveraineté, fit rompre devant un notaire apostolique, en présence du seigneur de Chièvres, du seigneur de Rœulx, du baron de Montigny, du chambellan Courteville, tous chevaliers de la Toison-d’Or, et par la déclaration des deux parties, l’engagement qu’elles avaient pris l’une à l’égard de l’autre[5] ; puis il éloigna durement le comte Frédéric sans consentir à le voir, malgré ses supplications[6], et il conduisit sa sœur en Espagne pour la marier avec le roi de Portugal.

  1. Mémoire du 27 octobre dressé par l’empereur Maximilien pour le roi catholique. Le Glay, Négociations, etc., t. II, p. 172.
  2. Lettre de remerciement de François Ier à l’électeur palatin du 13 août. Minute sur parchemin. Archives, carton J. 932, pièce 24.
  3. Annalium de vita et rebus gestis, etc., Frederici II, electoris palatini, libri XIV. Authore Huberto Thoma Leodio. In-4°. Francofurti, 1624, lib. IV, p. 68.
  4. Cette lettre est parmi les papiers de Simancas aus Arch. nat., sér. B, lia. 2. n° 79.
  5. Cet acte est dans les papiers de Simancas. Ibid., n° 79’.
  6. Lettres du comte Frédéric. Ibid., n° 79(4).